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Ce matin-là, Kikala se leva tôt. Comme c'était le jour de ses douze ans, son oncle l'avait convoqué pour le soumettre à l'épreuve rituelle. Il avala le petit en-cas que sa mère lui avait préparé : un solide steak d'hippopotame accompagné de tapioca, et quelques sauterelles en guise de friandises.
Puis il alla voir le vieil oncle, qui lui marmonna :
- Va consulter le crâne qui parle. Fais-lui l'offrande d'un serpent, et il t'enseignera la sagesse. Tu me rapporteras ses propos. Tu le rencontreras sur le gros rocher, tout près de l'île qui se trouve au milieu du lac des Ancêtres.
Le petit Kikala revint chez sa mère.
- Que te faut-il accomplir ? lui demanda-t-elle.
- Voir l'os près de l'île, dit-il, sibyllin.
Kikala s'en fut à travers les plaines du pays. Il longea une des sept rivières qui se jetaient dans le lac des Ancêtres et enfin arriva au lac.
- Fin de la première partie -
Il trouva un esquif et pagaya jusqu'à l'île. Dès qu'il vit un serpent d'eau se faufiler entre des roseaux, il l'attrapa prestement puis poursuivit son chemin avec son trophée jusqu'au rocher jouxtant l'île. Là, un crâne trônait effectivement au-dessus d'une sorte d'autel en forme de tabouret dogon sur lequel Kikala occit le serpent en le tailladant de son coupe-coupe, comme s'il se fût agi d'un quelconque saucisson de phacochère. Il attendit patiemment, mais le crâne s'entêta dans son silence létal.
Lorsque Kikala rentra au village, l'oncle s'enquit des événements. Le neveu hésita : devait-il fabuler ? Se souvenant du pacte scellé entre eux, il décida de ne rien lui celer :
- J'ai fait l'offrande au crâne, mais il est resté bouche cousue.
- Eh bien, Kikala, tu le sais maintenant : le silence est la vertu du sage.
Rasséréné, Kikala s'en retourna vers la case départ.
- Enfin te revoilà ! s'écria sa mère en le voyant arriver. Va donc nous ramasser du bois pour cuire le ragoût d'impala aux échalotes.
Et Kikala le sage ressortit exécuter sa tâche, aussi muet que les crânes de ses aïeux.
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(c) Plathey - 2002
