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A quelques kilomètres du petit village de Salem, alors que de son église les douze coups cristallins de minuit s'égrenaient comme un chapelet, un murmure venu du ciel se fit entendre au-dessus d'une clairière ; soudain, une pléthore de balais étrangement chevauchés surgirent de la brume duveteuse qui envahissait le ciel. Quelque deux cents sorcières atterrirent et, peu après, l'Internationale du maléfice était psalmodiée. Le vingt et unième symposium oecuménique des sorcières s'ouvrit et l'on entra de plain-pied dans les discussions.
Après que moult oratrices se furent succédé, une participante annonça qu'elle venait de découvrir un nouveau philtre qu'elle prépara devant toute l'assemblée. Elle présenta tout d'abord une marmite remplie d'eau bouillante, saisit une fiole contenant un breuvage quintessencié qui dégageait des effluves musqués, et en versa le contenu dans le récipient, après quoi elle exécuta des passes magiques. Une explosion se produisit et le public renifla, ravi, une odeur suffocante de soufre.
Le liquide, dans le chaudron, bouillonnait à présent. L'officiante prit alors des feuilles hachées menu de ciguë et de belladone qu'elle jeta dans la marmite, ajouta une pincée de dents de piranhas en poudre puis, pour relever le goût, quelques pétales dorés d'hibiscus, de la cannelle ainsi que des colchiques fraîchement cueillis. Elle fit apparaître un koala et un coq qui se retrouvèrent promptement précipités dans le bouillon. Elle y vida un jéroboam d'acide chlorhydrique et les animaux furent vite dissous. Le philtre était fin prêt.
"Comment l'appelle-t-on ? " demandèrent des congressistes d'un ton gourmand, çà et là dans la foule.
"C'est du coq au koala. " répondit le cordon-bleu.
Depuis lors, ce breuvage est appelé coca-cola.
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(c) Plathey - 1991
