Littérature Anglo-saxonne
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Sylvia Plath en 1957
- La Cloche de détresse (The Bell Jar, 1963). Traduit de l'anglais en 1972 par Michel Persitz. Préface de Colette Audry. Note biographique de Lois Ames. L'Imaginaire Gallimard. 280 pages. Lors de sa réédition à New York en 1971, "toute une jeunesse pouvait se reconnaître dans cette étudiante de dix-neuf ans, écartelée entre sa vocation d'artiste et d'intellectuelle et le modèle féminin que lui impose l'entourage ; entre les routines, l'assoupissement de sa petite ville d'origine et le tumulte publicitaire de son expérience new-yorkaise." (préface, page 9). Plus loin dans la préface, Colette Audry pointe le risque de ce genre de texte : que le lecteur y porte un intérêt extra-littéraire, qu'il s'arrête à la fascination de l'anormalité, du morbide. La narratrice, Esther Greenwood a dix-neuf ans. Elle a remporté un concours de poésie organisé par un magazine de mode, et a droit à un stage, elle et les autres lauréates. Elles assistent à des cocktails, à des gueuletons gratuits (ce qui donne lieu à des passages très amusants dans lesquels Esther mange tout ce qu'elle peut de caviar), reçoivent plein de cadeaux. Tout ça est bien sûr clinquant et vain. Esther se dit que, après ses études, lorsqu'elle aura épuisé toutes les bourses qu'elle a remportées pour étudier, il faudra bien qu'elle trouve un travail. Mais quoi ? quel travail serait-il intéressant ? Le stage est fini, il faut quitter New York, revenir dans la petite banlieue de Boston... et la crise arrive. On la sentait pointer. Esther ne parvient plus à dormir. Esther reste lucide : elle aurait vraiment pu se suicider en se jetant d'un pont, au lieu de tenter d'autres moyens plus aléatoires. À propos de pont, à un moment elle veut faire une tentative, mais en est empêchée. Toutefois, elle écrit : "Je soupçonnais que même si ma mère et mon frère n'avaient pas été là, je n'aurais pas non plus tenté de sauter." (page 203). Là, on pense qu'il est souvent difficile d'expliquer les motivations exactes d'un suicide, ou pourquoi certains passent à l'acte à un moment donné plutôt qu'à un autre. Voici ce qu'aurait dit Sylvia Plath, citée par sa mère, dans une lettre à un éditeur américain: "« J'ai essayé de peindre mon univers et les gens qui l'habitent tels qu'ils m'apparaissaient vu au travers du verre déformant d'une cloche de verre. »
On aurait pu craindre un livre sinistre, mais La Cloche de détresse est vif, sans pathos, très bien écrit et construit (il y aurait beaucoup à dire, et je suis sûr qu'une relevture doit permettre de découvror plein de choses), souvent avec humour (cet humour n'étant pas forcément gai ou optimiste). Il y a une belle galerie de de personnages hauts en couleurs, burlesques... Que ces personnages soient réellement burlesques on bien seulement perçus comme tels par la narratrice, c'est autre chose... On n'oubliera pas que, comme le disait Sylvia Plath, ces personnages sont déformés par la fameuse cloche de verre...
Interview de Sylvia Plath :
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