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INOUE Yasushi
(Asahikawa, 06/05/1907-Tôkyô 29/01/1991)
Inoué Yashushi est né à Asahikawa (Hokkaido) en 1907.
C'est la maîtresse de son arrière-grand-père, une ancienne geisha, qui l'élève pendant quelques années. Il le racontera dans Shirobamba (1960,1962, traduit en français en deux volumes : Shirobamba et Kôsaku).
Après des études de philosophie à Kyoto (diplômé en 1936), il se lance dans l'écriture et le journalisme.
Il obtient le prix Akutagawa en 1949 pour Combat de Taureaux.
Il publie un nombre considérable de romans - notamment historiques -, nouvelles, poèmes.
On peut citer Fusil de Chasse (1949), La Paroi de Glace (1950), Le Loup Bleu (1960), Le Maître de thé (1991).
Shirobamba (Shirobamba, しろばんば, 1960-1962 ; 249 pages, Folio, traduit en 1991 par Rose-Marie Fayolle avec la collaboration d'Anne Rabinovitch).
"" (page 9).
Un shirobamba, qui est apparemment une sorte de puceron : Prociphilus oriens (voir http://en.wikipedia.org/wiki/Prociphilus et wikipedia japonais ici et là). Les shirobambas sécrètent une substance qui ressemble à du coton ou de la neige et se laissent généralement porter par le vent.
Kôsaku, un petit garçon, est le héros de l'histoire. C'est l'auteur, petit : le livre est "très largement autobiographique" (quatrième de couverture).
Kôsaku vit avec celle qu'il appelle "grand-mère" Onui , mais qui est en fait la maîtresse de son arrière-grand-père, décédé depuis longtemps. "La véritable demeure de Kôsaku, que l'on appelait
« La maison d'en-haut », se trouvait en face de la mairie. Son grand-père et sa grand-mère y habitaient, ainsi que les frères et soeurs de sa mère, des garçons et des filles qui étaient donc ses oncles et tantes. Mitsu, la plus jeune, avait le même âge que lui." (page 10). Ses parents (le père est militaire) et sa soeur vivent très loin de là, à Toyohashi. "Là", c'est un petit village, Yu-ga-Shima, la toile de fond du roman. Pour aller voir ses parents, il lui faut prendre la voiture à cheval, le tramway et le train. C'est une expédition. D'ailleurs, quand Kosaku et grand-mère Onui vont voir les parents de l'enfant, puis reviennent au village, on a ceci :
" [...] (pages 122-123).
C'est un monde où ""(page 36).
Shirobamba, c'est
la campagne, les baignades dans la rivière, les jeux entre gosses, les différences entre les gens des villes et des campagnes, les événements qui ponctuent les années (fêtes de l'école, courses de chevaux), mais aussi les histoires de familles, les ragots ; et, d'un point de vue plus personnel concernant Kôsaku, c'est le récit
des "premières fois", sa découverte de la vie, de la mort, tout ça.
Un très bon roman, vraiment très agréable à lire, très "vivant". On sent du vécu derrière.
La suite juste après.
Kôsaku (Shirobamba, 1960,1962 ; 251 pages, Denoël - Empreinte, traduit en 1995 par Geneviève Momber-Sieffert).
Deux ans se sont écoulés depuis la fin du volume précédent (Shirobamba). Kôsaku a maintenant onze ans.
"" (page 7).
Fascinants, ces gens qui viennent d'ailleurs. La fille, Akiko, est d'ailleurs spécialement fascinante aux yeux de Kôsaku.
"" (page 35).
Eh oui, encore une première fois !
Des ruptures se profilent à l'horizon, et tout particulièrement un événement majeur en ligne de mire : le collège.
Mais avant cela, il faut réussir l'examen d'entrée, et donc travailler très dur, surtout pour intégrer un bon collège d'une ville. En effet, le niveau n'est vraiment pas le même entre les écoles de la ville et celles de la campagne. Un instituteur lui dit :
" [...]»" (page 163).
Grand-mère Onui n'encourage pas vraiment Kôsaku : travailler trop, ça abîme la santé, et la santé, c'est ce qu'il y a de plus important.
Typhon, découvertes diverses liées à des visites à de la famille qui habite dans des villes... Kôsaku élargit son horizon.
Pour résumer : la suite des aventures de Kôsaku, son initiation à la vie, dans la lignée du volume précédent.
Très bien.
Seize ans après la parution en grand format, le livre sort enfin en format poche (juin 2011).
Le Maître de thé (Honkaku bô ibun ; 1991 ; 221 pages, Stock - traduit en 1995 par Tadahiro Oku et Anna Guerineau).
Ce roman, qui met en scène des personnages ayant réellement existé, est censé être le journal du moine Honkakubô, qui a été un élève de Rikyû (1522-1591), "le plus grand Maître de thé du style simple et sain. Il s'est donné la mort pour une raison demeurée mystérieuse." (page 8).
Une raison mystérieuse... c'est le sujet du roman. Le mystère de sa mort peut-il être percé à travers les souvenirs de Honkakubô et des diverses personnes qui ont connu le Maître, et que Honkakubô rencontre au fil des différentes parties du livre ?
"" (page 14).
Qu'est-ce qui a causé la colère du Taïkô Hideyoshi, au point d'ordonner à Rikyû de se faire seppuku ? Pourquoi Rikyû n'a-t-il pas demandé grâce ?
Les liens entre le thé et la mort sont creusés. "De son vivant, mon Maître m'affirmait qu'au bout de la Voie du Thé, on arrive dans un univers tari, engourdi par le froid." (page 21). Qu'est-ce que cela veut dire ?
Le thé et la mort sont intimement liés.
" " (page 54).
La mort est même présente sur la calligraphie accrochée lors d'une énigmatique cérémonie du thé :
"" (page 57). Cette phrase, Honkakubô va la ressasser, encore et encore, car il ne la comprend pas bien.
La mort est donc très liée au thé, et à sa cérémonie. D'ailleurs :
"" (page 148).
Généralement, on apprend le décès du personnage que l'on avait rencontré dans la partie précédente, et qui avait évoqué la mémoire de Rikyû, que ce soit au cours d'un événement important, ou bien un détail remémoré :
"" (pages 106-107).
On arrive peut-être à une explicitation des relations entre la mort et le thé :
"."(page 199).
Grâce à la certitude de la mort, Rikyû parvient à un détachement plus grand, et c'est alors qu'il a vraiment compris le sens du thé simple. Etre seul avec le thé, cela suffit. Il n'est nul besoin de convier beaucoup de monde à une cérémonie.
L'acception de la mort est comparable au style simple du thé : acceptation, détachement, simplicité extrême. On arrive ainsi à l'essentiel.
En gros.
Un bon roman, qui donne à penser. Une quête calme.
Il vaut quand même mieux s'intéresser un peu au thé, et ne surtout pas s'attendre à des révélations fracassantes. Le mystère d'une mort peut être comme celui d'une vie : insondable.
Dans tous les cas, je ferai attention en buvant ma prochaine tasse de gyokuro (à défaut de matcha).
A noter, tout de même, que le roman date de l'année de la mort de l'auteur.... il avait près de 84 ans.
On lit sans doute différemement un texte sur la mort lorsque son auteur a dépassé les quatre-vingts ans que s'il est dans la trentaine.
Les amateurs de thé pourront bien sûr lire Le Livre du thé, de Okakura Kakuzô
Nuages garance (127 pages, Philippe Picquier - traduit en 1997 par Aude Fieschi).
""( page 5).
C'est même le regard qu'un adulte jette rétrospectivement sur lui, enfant, jettant un regard sur le monde des adultes. En effet, la quasi totalité de ces nouvelles se finissent sur un petit paragraphe de commentaire du narrateur adulte.
Dommage, quand même, que la totalité du recueil japonais n'ait pas été publié en un volume en français. Là, on n'a que 127 pages...
La première nouvelle, La casquette, se situe à la suite des souvenirs d'enfance narrés dans Shirobamba et Kôsaku. Notre héros travaille d''arrache-pied pour un concours pour le secondaire. Venant de la campagne, il lui faut travailler d'autant plus, à cause de la différence de niveau. L'histoire tourne autour d'une anecdote, l'achat d'une casquette (et de chaussures), qui révèle la situation financière précaire de la famille.
Dans Branches nues, il est question de suicide d'amour (Shinju). C'est le soir. Dans un village, deux garçons jouent dehors. Ils entendent un bruit d'eau dans la rivière. Serait-ce un Shinju (suicide d'amour ?). "" (page 25).
On retrouve ce thème dans Le Chemin qui descend à la cascade, et un peu dans Mort d'une femme, sans doute la nouvelle la plus construite, qui ne se résume pas à une anecdote (comme Nuages garance, par exemple).
La quasi-totalité de ces récits se déroulent dans de petits village de campagne. Des enfants jouent dehors, sortent du village avec des bâtons (en cas d'attaque de bandes de gosses des hameaux avoisinants), espionnent les adultes, et notamment les étrangers qui séjournent dans des hôtels (viennent-ils pour se suicider ?). Ces enfants s'interrogent et devinent parfois confusément des situations ou des motivations qui les dépassent.
Des récits souvent nostalgiques - plus des vignettes que des nouvelles - qui ne feront pas à eux seuls la gloire d'Inoué, mais qui ne sont pas à dédaigner.
- Combat de taureaux. Nouvelles traduites par Catherine Ancelot. 223 pages. Stock.
"" (Préface - rédigée par Inoué en 1988 pour l'édition française - pages 6-9).
Cela tombe bien : les cinq nouvelles de ce livre font partie de celles qu'Inoue lui-même avait rassemblées en un recueil car elles lui plaisaient particulièrement.
1/ Combat de taureaux (Togyu, 1949). Prix Akutagawa 1949. 95 pages.
Nous sommes en décembre 1946.
Un petit organisateur
de spectacles propose à un journaliste d'organiser un combat de taureaux, qui serait financé en partie par son journal.
"" (page 21)
Difficulté d'organisation, problèmes financiers, risques divers, entourloupes, magouilles des uns et des autres... Le lecteur suit pas à pas la mise sur pied du combat. A cela s'ajoute l'attirance d'une femme pour le journaliste, mais ce dernier fait passer son travail bien avant les sentiments... il n'y a pas de bluette ici, la femme sait à quoi s'en tenir.
Le cadre de la nouvelle - l'immédiat après-guerre - est intéressant, la nouvelle n'est pas mauvaise du tout, et même plutôt bonne, mais il semble manquer quelque chose... l'histoire est racontée de façon factuelle et il ne semble pas y avoir un autre niveau de lecture, quelque chose de plus profond que les simples faits (même si, bien sûr, on peut voir du bon gros symbole dans le combat de taureaux).
2/ Le Pic Kobandai (Kobandai, 1961). 35 pages.
"" (page 115). Et voilà que le sol tremble... cela n'annonce rien de bon, d'autant qu'une "tragédie" est annoncée dès la sixième page de la nouvelle...
Bonne nouvelle, notamment vers la fin...
3/ Chemins (Michi, 1956). 23 pages.
"" (page 149).
Le narrateur repense à son oncle qui, vers la fin de sa vie, faisait lui aussi une promenade en suivant un chemin bien particulier... "[...] " (page 165). Peut-être y a-t-il des "bons" et des "mauvais" chemins...
Pas mal du tout (il y a un certain mystère qui flotte), mais un petit peu long dans la première moitié.
4/ Les roseaux (Ashi, 1956). 24 pages.
Le narrateur lit une dans le journal que "[...] ." (page 175) Mais le garçon n'ayant conservé que quelques fragments de souvenirs, le père ne pourra jamais savoir s'il est bien son fils (encore un début d'histoire qui tombe à l'eau avec les progrès de la science, un test de paternité, et le tour est joué).
Et le narrateur d'embrayer sur les fragments de souvenirs qu'il garde de son enfance à lui, d'essayer de reconstituer une image à partir de quelques cartes. Pourquoi certains souvenirs lui restent-ils ?
Une petite nouvelle.
5/ Les Gants de Monsieur Goodor (Gûdoru-shi no tébukuro, 1953). 23 pages.
De manière fortuite, le narrateur voit une calligraphie d'un certain Matsumoto Jun, un médecin. Il en vient à repenser à son arrière-grand-père, qui avait été son élève, et à Konojo, la maîtresse de son arrière-grand-père... Dans cette nouvelle encore, il y a un travail du narrateur sur la mémoire, une tentative de reconstitution d'événements passés, des motivations des uns et des autres...
Bonne petite nouvelle.
Un recueil globalement intéressant.
Bizarrement, c'est la nouvelle qui donne son titre au recueil qui ne semble pas à sa place, tellement elle est différente des autres (qui sont racontées à la première personne du singulier) : Combat de taureaux est factuel, un peu journalistique (le métier de son héros). Le prix Akutagawa récompense d'ailleurs un roman, pas une nouvelle. Combat de taureaux semble se situer entre les deux genres : trop long pour une nouvelle mais, pour un roman, manquant d'un petit quelque chose.
Les quatre autres nouvelles, elles, sont toutes des reconstitutions, des enquêtes à travers le temps et la mémoire souvent familiale, et n'ont n'ont pas tout révélé une fois que l'on a fini de les lire.
- Histoire de ma mère. (Waga haha no niki, 1977). Récit traduit du japonais par René de Ceccatty et Ryôji Nakamura. 142 pages. Stock.
Il s'agit d'un texte autobiographique consacré à la mère de l'auteur atteinte de sénilité dans les dernières années de sa vie, vers la fin des années 1960.
Le texte commence ainsi :
"" (page 5).
Le père ne sort quasiment jamais de chez lui, pas même pour rendre visite aux voisins.
"" (page 7).
Bien curieux et intéressant personnage que ce père.
"" (page 14).
Au moment du décès du père, la mère était en bonne santé physique, "[...] " (page 15).
Un an plus tard, elle s'en va vivre chez sa fille cadette.
Elle raconte des histoires que tout le monde a déjà entendues cent fois... et recommence.
La voici qui réside pour quelques jours chez notre auteur, au travail dans son bureau.
" " (page 17).
Elle sent que son entourage n'agit pas naturellement ; elle a parfois l'impression qu'on la trompe. Elle est méfiante. Un fond de méchanceté semble remonter à la surface.
Elle passe d'une obsession à une autre, du jour au lendemain, sans que personne n'en comprenne la raison.
"". (pages 18-19)
Ses enfants s'interrogent sur son évolution mentale. Elle semble avoir entrepris un voyage sans retour dans le passé.
"Mais ce n'est pas aussi simple : [...]" (page 38).
Quand on lui rappelle des souvenirs heureux :
"" (page 38).
"" (pages 39-40)
Cela amène à une bonne question : "" (page 57).
Réaction d'une fille : "" (page 115)
Les enfants et petits-enfants tentent de percevoir une logique dans son comportement.
"" (page 124).
Autant la mère semble ne conserver en mémoire que les mauvais souvenirs, autant, en ce qui concerne les gens, elle semble ne se souvenir que de ceux qui ont été gentils avec elle. Or, elle finit par ne plus vraiment se souvenir de ses enfants.
"" (page 130).
Un très bon livre, même s'il vaut mieux avoir le moral avant de le lire.
Films d'après son oeuvre :
- Sengoku burai (1952), réalisé par Inagaki Hinoshi.
- Kuroi ushio (1954), réalisé (et interprété) par Yamamura Sô, dont c'est l'un des quatre films en tant que réalisateur. Deux prix aux Blue Ribbon Awards (meilleur réalisateur et meilleur acteur pour un second rôle).
- Midori no nakama (1954), réalisé par Mori Kazuo
- Ashita kuru Hito (1955), réalisé par Kawashima Yuzo.
- Asunaro monogatari (1955), réalisé par Horikawa Hiromichi
- Hyoheki (1958), réalisé par Masumura Yasuzo (le réalisateur de l'Ange Rouge, notamment). Adaptation de La Paroi de glace (1950).
- Ryoju (1961), réalisé par Gosho Heinosuke.
- Yushu heiya (1963), réalisé par Toyoda Shirô
- Taiyô wa yondeiru (1963), réalisé par Sugawa Eizo. Avec notamment Shimura Takashi,un habitué des films de Kurosawa.
- Five More (1966), premier épisode de la série, réalisé par John McGrath.
- Fûrin kazan (1969), réalisé par Inagaki Hiroshi. Avec Mifune Toshirô.
- Kaseki (1975), réalisé par Kobayashi Masaki (le réalisateur de Kwaidan, 1964). Deux récompenses aux Blue ribbon awards : meilleur film et meilleur acteur.
- Tonkô (1988), réalisé par Satô Jun'ya. Cette adaptation des Chemins du désert (1959) a reçu de très nombreuses récompenses aux Awards of the Japanese Academy (meilleur film, acteur, photo, montage...), et meilleur film aux Blue Ribbon Awards.
- La Mort d'un maître de thé (Sen no rykyu, 1989), réalisé par Kumai Kei. Avec Mifune Toshirô. Lion d'argent au festival de Venise 1989.
- O-Roshiya-koku suimu-tan (1992), réalisé par Satô Jun'ya. Avec Ogata Ken.
- Hyoheki (2006), 6 épisodes. Il s'agit de l'adaptation de La paroi de glace (1950).
- Chacha (2007), réalisé par Hashimoto Hajime.
- Lang zai ji (2009), de Tian Zhuangzhuang (le fameux réalisateur du Cerf-volant bleu). Avec Maggie Q.
- Waga Haha (2012), réalisé par Harada Masato.
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