(14/07/1979 - )
L'auteur, récipiendaire du prix Akutagawa en 2016.
"En 2011, elle remporte le Prix Noma des nouveaux auteurs pour Meri doku (ぬるい毒?), en 2013, le Prix Kenzaburō Ōe pour Arashi no pikunikku (嵐のピクニック), le Prix Mishima en 2014 pour Jibun o suki ni naru hōhō (自分を好きになる方法?, Comment apprendre à s'aimer, éditions Philippe Picquier 2016), et enfin en 2016, elle remporte le Prix Akutagawa, le plus célèbre prix littéraire japonais, pour Irui kon'in tan (異類婚姻譚, Mariage contre nature, éditions Philippe Picquier 2017)." (Wikipedia)
A gauche, couverture d'Eri Tashiro ; à droite, la couverture japonaise.
- Mariage contre nature (異類婚姻譚, Irui kon'in tan, 2016). Traduit par Myriam Dartois-Ako. Editions Philippe Picquier, 119 pages.
"Un jour, j'ai remarqué que nos visages, à mon mari et moi, se ressemblaient comme deux gouttes d'eau.
Personne ne m'en a fait la réflexion. C'est par hasard, alors que je triais les photos emmagasinées dans l'ordinateur, que cela m'a soudain sauté aux yeux. C'était juste une impression en comparant les photos d'il y a cinq ans, avant notre mariage, avec des clichés récents, rien sur quoi je puisse vraiment mettre le doigt." (page 5)
Notre héroïne, San, est femme au foyer sans enfant. Son mari, lorsqu'il revient du travail, adore regarder la télévision (surtout des émissions de variétés) pendant des heures, un verre à la main.
Un jour, après avoir dit à sa femme qu'il aime avoir l'esprit embrumé (d'où l'alcool et la télé à haute dose), il lui demande :
"On n'a pas besoin d'avoir des conversations sérieuses à la maison, tu ne crois pas ? [...] Tu me bassines avec tes conversations sérieuses, et d'ailleurs sont-elles vraiment si importantes que ça ? Ça ne serait pas plutôt toi qui veux parler de choses sérieuses, alors que ça n'existe pas ?" (pages 107-108).
A un moment, après avoir trop joué avec son ipad, le visage du mari change :
"La position de ses yeux et de son nez commençait vraiment à clocher. Ce n'était même plus celui d'un être humain." (page 62).
Qu'est-ce qui fait un couple, quelle est la nature de la relation dans un couple ? Qui est-ce qui l'emporte ? ("Tu commences à me ressembler, ça me fait plaisir", dit le mari, page 91). Faut-il mettre de la distance, parfois ? C'est le thème central de ce livre, et il s'exprime souvent par des modifications physiques du visage.
Le livre se teinte souvent d'un peu de fantastique (des visages qui changent, des galets qui permettent de jouer le rôle d'un tampon entre un mari et une femme), pour parler des relations de couple. Mais est-ce que ces nombreuses histoires de changements et de transformations ne sont pas à force un poil répétitives, un peu trop évidentes ? L'histoire des galets était un bon passage, mais après, il y a me semble-t-il un peu trop d'insistance sur les visages qui changent.
De plus, il y a dans le livre des choses bizarres, mais sans doute très signifiantes.
Par exemple, pour leur lune de miel, le couple est allé à Machu Picchu, parce que le mari avait vu par hasard des images de ruines à la télé. Ils ont donc réservé dans une agence de voyage et ne se sont rendu compte qu'après que Machu Picchu, c'est dans la montagne, et qu'elle est plutôt haute. Et que ce n'est pas facile d'accès.
Je suppose qu'il faut en conclure que le mari ne réfléchit pas trop (logique, c'est ce qu'il aime à la maison), et que sa femme le suit aveuglément (là, je comprends un peu moins), car ce n'est qu'après la réservation qu'elle a regardé ce qu'il en était sur des sites (autre conclusion : l'agence de voyages n'a pas fait son boulot d'information, mais de ça le livre ne parle pas, sans doute n'y a-t-il pas de symbole lié au couple là-dedans). Pourtant, on ne peut pas dire qu'il s'agisse d'un petit voyage, qu'on réserve à la légère. D'accord, il ne faut pas toujours chercher de la rationalité dans les livres, mais cela gêne parfois
ma suspension consentie de l'incrédulité.
Mariage contre nature se lit rapidement et n'est pas désagréable du tout, il y a même quelques bons passages. Il est finalement meilleur que Comment apprendre à s'aimer (dont il faudra que je parle), le précédent livre de l'auteure traduit en français, mais il m'a semblé manquer de consistance sur la durée, pourtant pas très longue, et trop verser dans le symbole évident.
Mais, comme il a remporté le prix Akutagawa et de nombreuses bonnes critiques (dans des journaux, tout ça), j'ai sans doute tort.
Films d'après son oeuvre :
- Funuke domo, kanashimi no ai wo misero (Daihachi Yoshida, 2007), adapté d'un roman de l'auteur. Pas mal de nominations.
-
Ranbô to taiki (Masanori Tominaga, 2010), adapté d'une pièce de théâtre de l'auteur. Avec notamment Tadanobu Asano.
Bande-annonce :