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Project Itoh (Itō Keikaku,伊藤 計劃), de son vrai nom Itō Satoshi (伊藤 聡 )
(Tokyo, 14/10/1974 - 20/03/2009)
Né en 1974 à Tokyo, Keikaku Itoh est diplomé du "Department of Imaging Arts and Sciences" de l'Université d'art de Musashino. Tout en travaillant comme web designer, il écrivit Genocidal Organ (Gyakusatsu kikan, 虐殺器官, 2007), roman qui fut publié et fut nominé au Nihon SF Taisho Award.
Il a également publié Metal Gear Solid : Guns of the Patriots (Metaru gia soriddo ganzu obu za patoriotto, メタルギア ソリッド ガンズ オブ ザ パトリオット, 2008), novélisation du jeu vidéo Metal Gear Solid 4: Guns of the Patriots.
A partir de 2001, il dut être fréquemment hospitalisé à cause d'un cancer. Il est mort en mars 2009, à 34 ans, laissant un roman inachevé, L'Empire des cadavres (Shisha no teikoku, 屍者の帝国), qui fut achevé par Toh EnJoe (auteur ayant reçu le prix Akutagawa en 2012) et obtint le prix Spécial aux Nihon SF Taisho en 2012.
Couvertures française, japonaise, anglo-saxonne et hongroise.
Harmonie (ハーモニー, 2008). Traduit de l'anglais par Christophe Cuq en 2013. Panini Books. 327 pages. Nihon SF Taisho Award 2009. Prix spécial du jury aux aux Philip K. Dick Awards 2010.
Le livre commence avec des balises xml :
"" (page 9)
Comme il se doit, à la fin de la première partie, on a deux balises fermantes :
""
(page 93). Oui, là il y a une erreur, il manque un "/" pour fermer correctement eml. Et, pire encore, le traducteur français a sans doute pris modèle sur le traducteur anglais, qui s'est lui-même trompé en ouvrant deux balises d'encodage de langue, de type <etml:lang>... il fallait juste enlever "jp" et mettre "fr" à la place.
Mais on n'est pas là pour parler de grammaire xml et autres règles du W3C version milieu du XXI° siècle...
Ce qui est plus important, c'est que tout le texte n'est bien sûr pas comme cela : seuls certains paragraphes du livre se trouvent dans ces fameuses balises xml.
Exemple :
"" (page 69).
Cela peut sembler gadget, mais - et c'est l'une des qualités du livre - contre toute attente, son utilisation se justifie, grâce à ce que l'on apprend à un moment...
Globalement seulement, parce que les énumérations sous forme de liste, elles, ne sont pas justifiées.
C'était pour la forme.
Maintenant, le fond : nous sommes au milieu du XXI° siècle. Après une période agitée connue sous le nom de Maelström (événement survenu en 2019), et pendant laquelle des bombes nucléaires ont explosé en plusieurs endroits du globe, une société idéale axée sur le bien-être et la santé a finalement vu le jour sur les ruines radioactives, et s'est étendue dans de nombreux pays.
Chaque adulte est équipé d'un WatchMe dans son corps, sorte de terminal contrôlé par une admédistration - un des conclaves médicaux qui se sont substitués aux pays - qui diffuse un essaim de médicules dans le corps. Ces médicules surveillent en permanence le métabolisme. Grâce à un module, le médisoin, ces WatchMe soignent les gens : ainsi, il n'y a plus de problèmes de santé (évidemment, on pense au fait que l'auteur était atteint d'un cancer).
Mais ce n'est pas tout : on ne peut plus consommer qu'une nourriture saine, l'alcool est proscrit, pareil pour la cigarette, ainsi que tout ce qui est bon au goût : la nourriture est désormais fade (plus de tentation de trop manger) mais bonne pour la santé.
Pire encore : plus personne ne dit plus de mal de qui que ce soit.
"" (page 19)
Toute violence est proscrite, ainsi que tout vocabulaire offensant. Il faut un permis spécial (le PERVERT, pour "PERmis de Visionner des Eléments Rétrospectifs Traumatisants") pour avoir le droit d'accéder aux contenus violents issus du passé.
Notre héroïne, Tuan Kirie, 28 ans, dispose d'un tel permis. Elle travaille pour l'OMS (même sens qu'aujourd'hui). Elle se rend régulièrement dans des pays en guerre, aux marges de la société médicalisée.
La voici qui revient au Japon en empruntant une sorte d'avion :
"" (page 73).
C'est à peine de la SF : dans notre vraie vie actuelle, on y arrive. On voit de plus en plus de restaurants arborer les avis favorables de TripAdvisor (ça m'a particulièrement frappé à Budapest ; même la visite de la Basilique Saint-Étienne était officiellement recommandée avec force étoiles par TripAdvisor, c'était bien en évidence !).
Pour en revenir au livre, personne n'a rien à cacher, tous ceux que l'on croise dans la rue ont leur note d'Evaluation Sociale bien en évidence, ainsi que nom, profession...
Il n'y a plus de gros, plus de maigres, tous les gens se ressemblent. Tout le monde est terne. Est-ce un paradis, ou un enfer contrôlé par des conglomérats médicaux ?
Certains parallèles sont tentés entre ce monde idyllico-totalitaire et le régime nazi : "" (page 147).
Il est donc tentant pour certains de vouloir donner un coup de pied dans cette belle construction, pour tout un tas de raisons. Et c'est ce qui se produit : une menace inédite apparaît. Un chantage incroyable, choquant, risque de mettre à bas la société... Notre héroïne est touchée de près. Elle va mener l'enquête...
Il y a de bonnes choses dans ce livre, principalement - outre le thème classique de la société parfaite mais parfaitement ennuyeuse, ici vraiment bien rendue grâce à la description de la Réalité Augmentée, ainsi qu'au fait que la dictature, ici, c'est l'obsession de la Santé - une interrogation intéressante sur ce qu'est la conscience, sur ce qui fait le "soi", la personnalité, ainsi que la description du mécanisme qui détermine le choix que fait un individu dans une situation donnée.
Il y a aussi des références sympathiques, littéraires (Abû Nûwas...) et cinématographiques (Casablanca : "", page 284), un proverbe amusant ("", page 277), mais souvent, beaucoup trop souvent, c'est long, beaucoup trop long...
L'intérêt fait le yo-yo : il aurait fallu couper pas mal de pages.
Intérêt très mitigé, donc : il y a de très bonnes choses, des originalités dans la forme et le fond, mais que de trous d'air...
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