Livre.gif (217 octets) Littérature Japonaise Livre.gif (217 octets)



-
dictées

- listes
- liens recommandés


Papillon.gif (252 octets)

-> retour Japon <-

retour
page d'accueil

 


USAMI Rin (
  宇佐見りん)

(Numazu, Shizuoka, 16/05/1999 -  )

Usami Rin

"Rin Usami naît à Numazu (Shizuoka) et grandit dans la préfecture de Kanagawa. Elle publie son premier roman, Kaka (かか), en 2019, et obtient deux prix pour cette œuvre : le prix Bungei et le prix Mishima Yukio, dont elle devient la plus jeune lauréate. Son deuxième roman, Idol (Oshi, Moyu, 推し、燃ゆ), obtient le 164e prix Akutagawa. Ce roman est traduit dans plusieurs langues dont le français." (Wikipedia)

idol 

Idol (Oshi, Moyu, 推し、燃,  2020 ; Picquier, 140 pages, traduit par Sophie Refle en 2023).

Quand le roman commence, on entre directement dans le vif du sujet :

"Mon idol a dérapé. A ce qu'il paraît, il a frappé une fan. Pour l'instant, on n'en sait pas plus. Malgré ça, en un soir, tout s'est enflammé. J'avais eu du mal à m'endormir. J'ai peut-être eu une prémonition, parce que je me suis réveillée dans la nuit. J'ai regardé l'heure sur mon téléphone, les réseaux sociaux étaient en ébullition. De mes yeux ensommeillés, j'ai lu Masaki aurait frappé une fan. L'espace d'une seconde, tout m'a paru irréel." (page 5).

Akari, une lycéenne, est fan de Masaki, un chanteur qui fait partie d'un groupe commercial

"On peut s'intéresser à un idol de mille façons. Il y a des gens qui ont foi dans tout ce qu'il fait, d'autres qui estiment qu'on ne peut se dire fan si on ne distingue pas le bon du mauvais. Certains sont comme amoureux de leur idol et indifférents à ce qu'il crée, d'autres n'ont pas de sentiments pour lui mais recherchent activement le contact et réagissent à chacun de ses gestes. Il y a aussi des gens qui se concentrent sur sa production et ne se préoccupent ni des scandales ni des rumeurs. Pour d'autres, ce qui compte, c'est l'argent qu'ils dépensent, ou les échanges qu'ils ont avec les autres fans.
Moi, c'était de chercher à comprendre ses créations et tout ce qu'il était. Je voulais voir le monde comme il le voyait.
" (page 21)

Plutôt que d'être fan d'un petit groupe, qu'elle pourrait toucher, voir de près, Akari préfére être fan d'un groupe inatteignable.
"Moi, je n'ai aucune envie d'avoir un vrai contact. Je vais à des concerts, mais je préfère être une fan insignifiante. Avec les autres anonymes qui applaudissent, qui crient, qui disent merci dans leurs commentaires anonymes." (page 7)

Akari ne fait pas grand-chose au lycée. Lorsque sa soeur lui reproche son manque de travail en classe, elle lui répond : "L'important, c'est de se donner du mal, non ? Chacun son truc !" (page 64). "Soutenir mon idol était le centre absolu de ma vie, la seule chose dont je ne doutais pas. Le centre de ma vie ? Peut-être plutôt ma colonne vertébrale." (page 43).

Effectivement, elle s'en donne, du mal ! Elle tient régulièrement son blog, suit tout ce qui a trait à son idol, prend des notes (et ne s'étonne sans doute pas assez de certaines petites incohérences qu'elle découvre, elle qui connaît pas cœur les goûts et le CV officiel de son idol), publie des analyses, etc. Et, pour pouvoir se payer les nombreux goodies, les concerts, elle fait les petits boulots mal payés qu'il faut.

Le roman permet d'entrer dans l'univers de ces fans, victimes consentantes et passionnées d'une organisation commerciale bien huilée (ah, toutes ces occasions de dépenser de l'argent !). On découvre les votes de popularité périodiques en ligne (avec une incitation à l'achat de CD pour que le vote compte plus, c'est rudement bien pensé !), la mise en scène des résultats en direct sur le Net pour découvrir qui est le plus populaire dans le groupe et, donc, celui qui aura droit à une mise en valeur particulière lors du concert à venir...

Un bon court roman, qui fait découvrir ce monde de l'intérieur.

Pour compléter, un extrait (page 115) du très intéressant livre de Jean-Christophe Grangé, Tokyo Pourpre (avec photographies de Patrick Siboni, Albin Michel) : "Ce qui est le plus étrange, au Japon, c'est l'âge des fans - les wota (diminutif de otaku). S'il existe une cohorte d'adolescentes pour soutenir aveuglément leurs idols, il y a aussi un nombre conséquent d'adultes qui suivent le mouvement. Et pas n'importe lesquels : des hommes d'une quarantaine d'années, célibataires, salarymen et otaku (leurs loisirs se résument à rester chez eux, devant leur ordinateur). [...]

Ces hommes sont des fans, des vrais. Ils aiment et encouragent leur idol (la plupart d'entre eux sont capables d'acheter cent fois le même CD, simplement pour soutenir « leur » artiste). Ils sont amoureux d'une image, chérissent des objets, des figurines, des photos...
Cette dérive du désir est au sens propre une perversité mais en l'occurrence, il s'agit plutôt d'un sentiment, d'une obsession, pas d'une attirance sexuelle. Toutes mes amies japonaises ont un collègue de travail qui répond à ce profil. Sérieux, timide, inoffensif, sa raison de vivre est d'être fan, ni plus ni moins.
Encore une fois, l'homme japonais est flaubertien. Côté sentiment, il préfère rêver sa vie que la vivre."




- Retour à la page Littérature japonaise -

 

Toute question, remarque, suggestion est la bienvenue.MAILBOX.GIF (1062 octets)