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YOKOMITSU Riichi (横光 利一)

(Aizuwakamatsu, 17/03/1898 - Tokyo, 30/12/1947)

yokomitsu riichi

Vers 1942.

"Yokomitsu commence à publier dans des dōjinshi tels que Machi (« rue ») et Tō (« tour ») après avoir intégré l'Université Waseda en 1916.
En 1923, il publie Nichirin (« le soleil »), Hae (« une mouche ») et autres dans le magazine Bungeishunjū, titres qui font connaître son nom.
L'année suivante, il fonde la revue Bungei-Jidai avec entre autres Yasunari Kawabata. Yokomitsu et d'autres écrivains liés au Bungei-Jidai sont collectivement appelés le « Shinkankakuha », c'est-à-dire la nouvelle école des sensations, qui porte un intérêt particulier à la sensation et à l'objectivité scientifique. On peut citer son roman Machine (1930).
" (Wikipedia).

 

soleil

- Soleil. (Nichirin, 1923) Traduit et postfacé du japonais par Benoît Grévin. Editions Anacharsis. 126 pages

"En 1919, un jeune écrivain dévore la première traduction japonaise de Salammbô. Sous le charme, il décide qu'il créera l'équivalent japonais du célèbre roman de Flaubert : une oeuvre remplie de fureur et de sang, dont les dialogues seront des incantations, et qui conjuguera un exotisme aussi radical que celui de la Carthage des guerres puniques." (page 103).
Le roman de Yokomitsu Riichi n'est pas un pastiche de Salammbô : beaucoup plus court, il a un rythme rapide. Toutefois, on sent souvent, comme chez Flaubert, une certaine ivresse dans l'utilisation de mots évocateurs ou qui lui plaisent grâce à leur sonorité exotique ou ancienne.
Yokomitsu Riichi prend pour point de départ l'histoire de la reine-chamane Himiko mentionnée par un historien chinois du III° siècle (dans le Sanguo Zhi, ou Chronique des Trois Royaumes), dans le Japon archaïque protohistorique dont on ne sait actuellement que peu de choses.
Ainsi, Benoît Grévin dit que, contrairement à Flaubert qui avait dû se documenter avec minutie, Yokomitsu a pu laisser libre cours à son imagination. Son roman (qui tient aussi du conte)
est situé dans un Japon d'avant la sinisation "dominé par les forêts et les bêtes, où des hommes encore proches de l'animalité ne semblent vivre que pour se livrer à la guerre, à la chasse et à l'orgie" (page 111). Un beau programme !
La postface est très intéressante : elle resitue l'auteur dans l'histoire de la littérature japonaise (et notamment la doctrine « néo-sensationniste du shinkankuku-ha dont il fut la figure de proue avec Kawabata), parle de la difficulté de traduction, et analyse le roman. Et il a le bon goût de le faire dans une postface et pas une préface, de sorte de ne pas gâcher le plaisir du lecteur.

Nous sommes au III° siècle de notre ère. Le personnage principal du livre est Himiko, une jeune femme d'une beauté ensorcelante.
"Himiko, le corps enveloppé dans un habit teint couleur de pêche, faisait face à Hoko no Ôe, celui qui allait enfin devenir son époux ; elle triait des pierres-tubes et des pierres-courbes sur une peau de cerf. Hiko no Ôe, tourné vers la plage, contemplait les lumières des torches des pêcheurs qui commençaient à briller." (page 6). Des notes expliquent ce que sont ces pierres.
Pour le moment, tout va bien pour notre héroïne.
Le soir, Himiko s'enveloppe dans une peau de cerf. Il y a beaucoup d'animaux dans le roman, et énormément d'arbres, de plantes et de fleurs (une cinquantaine, dit Benoît Grévin dans sa postface ; la nature est omniprésente).
"Au milieu d'un buisson d'abutilon, un lièvre rêvait d'un faucon qui l'avait visé en plein jour." (page 8).
Ou encore : "Au-dessus de leurs têtes, une vrille de glycine festonnée d'orchidées et plusieurs rameaux de vigne vierge pendaient des branches d'un zelkova. Fougères, ciboules et cymbopogons formaient leur lit." (page 41)
Lorsque l'on va festoyer, voici ce que l'on peut manger :
"Sur les feuilles de chêne denté dont le vert éclatait à la lumière des torches, s'alignaient des grenouilles de montagne arrosées de suc de poivrier du Japon, et des crabes de montagne, du gingembre, des carpes, des baies d'alkékenge et des fruits de kiwaï encore verts. Puis c'était au milieu de récipients débarrassés de leur couvercle un amoncellement de salaisons de cerf et de sanglier enveloppées dans des prêles des champs fraîches." (page 72)

Mais revenons à notre héroïne. Himiko est donc très belle, trop belle. Alors qu'elle va se marier avec Hiko no Ôé, un jeune homme fait son apparition : c'est un mystérieux voyageur qui s'est égaré.
Le lecteur sent que les problèmes vont commencer...

À cette époque d'avant l'écriture, les hommes étaient plus proches de la nature, à tel point que la différence entre hommes et animaux était mince, ce qui est souligné de diverses façons (habits, tatouages...). Le livre baigne dans une violence primitive, avec des scènes parfois proches de l'hallucination. On frappe avec ce qui nous tombe sous la main, même un cadavre de cerf.
Comme dans certaines sagas islandaises, on tranche beaucoup, et facilement : bras, oreilles... On ne compte plus les morts : c'est que les mâles qui désirent posséder Himiko sont prêts à tout.

Il y a souvent des effets cinématographiques, qui devaient être à la pointe de ce qui s'écrivait dans les années 1920. Par exemple, des scènes sont vues en reflets dans les yeux des protagonistes, ce qui peut donner des résultats très curieux.


Cette histoire baroque, violente, située dans un Japon archaïque mais écrite dans un style expérimental est souvent surprenante.
Soleil est très bon et très original, et comporte des scènes marquantes.
On espère vivement pouvoir lire d'autres oeuvres de l'auteur : des romans comme Machine (1930), Tristesse du Voyage (1937-1946), ou encore des nouvelles (Le Printemps, à bord de sa diligence ; Napoléon et la teigne...)

On pourra lire des extraits de l'ouvrage sur : http://editions-anacharsis.com/Soleil

 

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