Livre.gif (217 octets) Littérature Russe et d'Europe centrale Livre.gif (217 octets)



-
dictées

- listes
- liens recommandés


Papillon.gif (252 octets)

-> retour Russie et... <-

retour
page d'accueil

 


Varlam Chalamov
(Варлам Тихонович Шаламов )

(Vologda, Russie, 18/06/1907 - Moscou, 17/01/1982)

varlam chalamov


"Le père de Chalamov est un prêtre orthodoxe, ce qui va lui occasionner des difficultés après la Révolution de 1917 : Varlam Chalamov ne peut poursuivre ses études universitaires à Vologda, il doit partir pour Moscou, où il réussit en 1923 le concours d'entrée à la faculté de Droit de l'université d'État de Moscou (MГУ). Pour payer ses études à l'université, Chalamov travaille dans une tannerie.

Chalamov entre dans un mouvement trotskiste, et conteste le pouvoir de Joseph Staline, en particulier en diffusant de manière clandestine les Lettres au Congrès du Parti, appelées ultérieurement le Testament de Lénine. Ces lettres de Lénine au Congrès mettent, entre autres, clairement en garde contre une éventuelle succession de Staline à la tête du Parti communiste. Arrêté le 19 février 1929, il est envoyé pour trois ans dans un camp de travail à Vichéra, dans l'Oural central.

Chalamov revient à Moscou en 1932 et y travaille comme journaliste et essayiste.

Les Grandes Purges le renvoient au Goulag : le 1er janvier 1937, Chalamov est arrêté pour « activité trotskiste contre-révolutionnaire », condamné à 5 ans et envoyé dans la Kolyma, région à l'extrême-est de l'URSS, au-dessus du cercle polaire arctique, connue sous le nom de « pays de la mort blanche ». Maintes fois, Chalamov souhaite la mort, mais mal nourri, abruti de travail dans les mines d'or, congelé par le climat polaire, battu par les détenus de droit commun, il survit pourtant. En 1943, toujours prisonnier, il écope d'une nouvelle condamnation, de 10 ans cette fois, et toujours à la Kolyma, pour « agitation anti-soviétique » pour avoir considéré Ivan Bounine comme un classique de la littérature russe.
[...]
En 1946, la chance sourit deux fois à Chalamov : au seuil de la mort, il ne peut plus travailler et est envoyé à l'hôpital au lieu d'être exécuté. De plus, le détenu-médecin Pantiouhov prend d'énormes risques pour le faire nommer aide-médecin. Chalamov reçoit un salaire (très faible, mais qui va lui permettre d'acheter des livres) et surtout améliore ses conditions d'existence : une plus grande autonomie, une vraie ration de nourriture et surtout il ne travaille plus dans une mine, mais dans un hôpital chauffé. Après une formation rapide, il gère l'accueil des malades de l'hôpital.

Varlam Chalamov est libéré en 1951, mais il doit rester à Magadan, la grande ville de la région jusqu'à novembre 1953.

La mort de Staline en mars 1953 change la donne pour les prisonniers des camps (zek ou ZK, abréviation pour zaklioutchon) : les morts sont réhabilités, beaucoup de vivants sont remis en liberté. Chalamov ne peut revenir à Moscou avant sa réhabilitation en 1956, il travaille dans une exploitation de tourbe à Kalinine à 100 kilomètres au nord-ouest de la capitale.

À Moscou, Chalamov publie des essais et de la poésie dans des revues littéraires tout en s'attelant à son œuvre majeure, les Récits de la Kolyma, dans laquelle il raconte son expérience des camps. Les épreuves sont envoyées dans les pays occidentaux en contrebande, ils sont aussi publiés en URSS par samizdat. Les Récits paraissent pour la première fois en 1966 et la première édition en langue russe (mais à l'étranger) en 1978. En 1972, Chalamov doit renier ses Récits, très probablement forcé par les pressions de l'État. Le livre paraît en URSS en 1987.

La mort de Chalamov est une métaphore de sa vie : pauvre, affaibli, malade, il s'éteint dans un hôpital psychiatrique moscovite en 1982. Il est enterré au cimetière de Kountsevo de Moscou." (source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Varlam_Chalamov ).

 

mes bibliothèques

- Mes bibliothèques. Traduit du russe par Sophie Benech. Editions Interférences. 54 pages.
Varlam Chalamov a eu une vie mouvementée et douloureuse, tout d'abord résumée en deux pages qui permettront de mieux comprendre le contexte de l'oeuvre autobiographique, centrée sur son rapport aux livres et à la lecture.

"Je ne me rappelle pas avoir appris à lire, et j'ai l'audace de croire que j'ai toujours su. À trois ans, âge auquel remontent mes souvenirs, je possédais la première et la dernière bibliothèque que j'ai jamais eue. Elle consistait en deux livres : Aïe, dou, dou ! et l'Alphabet de Tolstoï." (page 9).

"La bibliothèque de la prison des Boutyrki était surprenante. Pour des raisons incompréhensibles, elle avait échappé aux innombrables contrôles et « purges » systématiquement infligés à toutes les bibliothèques de Russie." (page 20). Il y trouve Le Racketteur d'Ehrenbourg, Le Conte de la lune non-éteinte de Pilniak, La Garde blanche de Boulgakov...
"C'était comme si les autorités avaient décidé d'offrir aux inculpés une consolation pour la longue route, pour le chemin de croix qui les attendait. Comme s'ils s'étaient dit : « À quoi bon contrôler les lectures de gens condamnés ? »
On distribuait des livres tous les dix jours, à raison d'un volume par occupant d'une cellule. Nous étions quatre-vingts dans une cellule prévue pour vingt-cinq personnes. Lire quatre-vingts livres en dix jours est chose impossible.
La lecture en prison a ses particularités : là-bas, on ne retient rien.Toute l'attention, toute la force de l'esprit sont concentrées sur les interrogatoires, sur l'instruction de l'« affaire », sur l'adaptation psychologique à la prison, à son mode de vie, à ses habitudes et à ses maîtres.
Il était impossible d'avoir une occupation sérieuse dans une cellule commune. [...] Il est possible que les autorités soient conscientes du caractère éminemment fugace de la lecture en prison, peut-être est-ce pour cela qu'elles ne se préoccupent guère du contenu criminel des bibliothèques de prison.
" (pages 21-25).

Après, pendant quatre années, c'est le travail dans la mine. "[...] chaque heure qui passait nous apprenait combien fragile est le vernis dont la civilisation revêt l'être humain. [...]
Nous avions oublié les livres. Il n'y avait pas de place pour eux dans nos pensées, ni dans notre lexique d'une vingtaine de mots - « lever », « travail », « repas » , « pic », « pelle », « escorte », « répartiteur », « gardien », etc.
" (page 24)

Les livres, les journaux et les radios sont interdits dans les baraques. "Un jour, près de la baraque du coiffeur, j'ai trouvé un morceau, un lambeau de journal ayant servi à envelopper du savon. Délicatement, j'ai gratté le savon et j'ai lu à voix basse ces mots étranges : « Léon Blum a formé un cabinet » [...]" (page 25).

Des années plus tard, il a un livre en main. "C'était La Chute de Paris d'Ehrenbourg. Je l'ai ouvert en rabattant la page de mes deux mains, je l'ai regardé attentivement et immédiatement, j'ai su que j'avais perdu mon ancienne faculté de lire. J'avais toujours lu extrêmement vite, je saisissais d'un seul coup d'oeil quinze à dix-sept lignes que ma conscience et ma mémoire assimilaient aussitôt. Ce jour-là, je regardais les lignes et je ne comprenais rien." (page 30).

Encore des années plus tard, il reviendra dans le monde de la lecture.
Et, dans un minuscule village de tourbières, il va trouver une bibliothèque remarquable.

Le texte se finit par ces mots :
"Les livres sont ce que nous avons de meilleur en cette vie, ils sont notre immortalité.

Je regrette de n'avoir jamais possédé ma propre bibliothèque.
" (pages 53-54).

Un texte sobre, très fort, qui permet de bien réaliser la chance que l'on a, nous.

 

- Retour à la page de Littérature Russe et d'Europe centrale -

 

Toutequestion, remarque, suggestion est la bienvenue.MAILBOX.GIF (1062 octets)