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Ray Bradbury

(Waukegan, Illinois, 22/08/1920 - Los Angeles, 05/06/2012)

ray bradbury

 

Il "est un écrivain américain, référence du genre de l'anticipation. Il est particulièrement connu pour ses Chroniques martiennes, écrites en 1950, L'Homme illustré, recueil de nouvelles publié en 1951, et surtout Fahrenheit 451, roman dystopique publié en 1953. [...]

Ces années 1950 sont pour Bradbury une période prolifique qui voit la publication de nombreux ouvrages : Les Pommes d'or du soleil et le roman Fahrenheit 451 en 1953, Le Pays d'octobre en 1955 et Un remède à la mélancolie en 1958. En 1953, il écrit le scénario du film Moby Dick de John Huston. [...]
En 1963 il écrit sa première pièce, Café irlandais, et l'année d'après il publie son roman La foire des ténèbres. En 1970 il publie Je chante le corps électrique, en 1972, c'est la pièce Théâtre pour demain… et après et en 1975 La colonne de feu. Sa pièce Madrigals for the Space Age, sur une musique de Lalo Schifrin est montée en 1973 au pavillon Dorothy Chandler. [...]

Ray Bradbury a écrit sur la survie spirituelle de l'humanité s'opposant au matérialisme de la société. Bien qu'il ait souvent été présenté comme un écrivain de science-fiction, Bradbury lui-même ne s'est jamais enfermé dans un type de narration :
« Avant tout, je n'écris pas de science-fiction. J'ai écrit seulement un livre de science-fiction et c'est Fahrenheit 451, basé sur la réalité. La science-fiction est une description de la réalité. Le fantastique est une description de l'irréel. Donc les Chroniques martiennes ne sont pas de la science-fiction, c'est du fantastique ».

Bradbury se préoccupe peu de réalité scientifique, et pour cela fut peu reconnu des amateurs américains de SF « pure et dure »." (Wikipedia)

 


fahrenheit 451

- Fahrenheit 451 (Fahrenheit 451,1953). Traduit de l'américain par Henri Robillot. Denoël. 191 pages.

Le livre commence par : "« Fahrenheit 451 », la température à laquelle un livre s'enflamme et se consume..."
Cela fait 232 degrés celsius.
"C'était un plaisir tout particulier de voir les choses rongées par les flammes, de les voir se calciner et changer." (page 11).

Notre héros, Montag (lundi, en allemand), est un pompier. Dans l'avenir proche où se situe le roman, un pompier est un homme chargé de brûler les livres.
Un jour que, après le travail, Montag rentre chez lui (il est marié), il rencontre une jeune fille qui engage la conversation avec lui. (les photos sont tirées du film de Truffaut).

fahnrenheit 451

"- Vous ne lisez jamais les livres que vous brûlez ?
Il se mit à rire.
- C'est contre la loi.
- Oh, c'est vrai.
- C'est un chic boulot. Le lundi, brûler Millay, le mercredi Whitman, le vendredi Faulkner, les mettre en cendres, ensuite brûler les cendres. C'est notre slogan officiel.
Ils firent quelques mètres puis la jeune fille demanda.
- Est-ce vrai qu'autrefois les pompiers éteignaient le feu au lieu de l'allumer ?
- Non. Les maisons ont toujours été ignifugées, croyez-moi. "
(pages 16-17).

La jeune fille semble connaître beaucoup de choses du passé. Ainsi :
"Vous avez vu les panneaux de cent mètres de long dans la campagne à la sortie de la ville ? Savez-vous qu'avant, ils avaient seulement une dizaine de mètres ? Mais les voitures filent si vite maintenant qu'ils ont dû les rallonger pour que la publicité garde encore son effet.
- Je ne savais pas ça, dit Montag avec un rire sec."
(page 18).
Avant de se quitter, voici ce que demande la jeune fille à notre héros :
"- Etes-vous heureux, dit-elle.
- Si je suis quoi ? s'écria-t-il. [...]
Heureux ? Quelle ineptie.
" (page 19).

La jeune fille ne regarde que rarement la télévision murale, contrairement à la femme de Montag. Elle est une femme au foyer, et sa vie tourne autour de la télévision murale. Les gens qu'elle y voit forment sa famille. Son rêve est que tous les murs du séjour soient dotés d'un écran mural, ce qui n'est pas encore le cas. Il faut dire que cela coûte cher.

fahrenheit 451
Dans le film de Truffaut, les écrans muraux du livre deviennent un poste de télévision mural. Les limitations techniques de l'époque, certainement... Mais le spectacle est tout aussi captivant.

Lors de leur rencontre suivante, la jeune fille dit à Montag qu'il lui arrive d'écouter les gens dans le métro, dans les parcs d'attractions...
"... et vous savez quoi ?
- Quoi ?
- Les gens ne parlent de rien.
- Oh ! c'est impossible.
- Non, non, de rien. Ils citent des marques de voiture, de vêtements, des adresses de piscines surtout, et ils disent : « c'est drôlement chic ! » Mais ils disent tous les mêmes choses et personne n'est jamais d'un avis différent. [...]
« Et dans les musées, y avez-vous été par hasard ? Rien que de l'abstrait, un point c'est tout. Mon oncle dit qu'autrefois, c'était différent. Il y a bien longtemps, les tableaux, parfois, exprimaient des choses ou même représentaient des hommes. »
" (page 42).

Mais pourquoi brûler les livres ? Déjà, pour ne choquer personne : tout ce qui est potentiellement choquant, qui peut offenser n'importe quelle minorité (de religion, de pensée, ou encore les fumeurs, les non-fumeurs) doit être supprimé.
De plus, et ceci concerne surtout les livres de philosophie, la plupart se contredisent ! Dès lors, à quoi bon lire ces philosophes qui tous croient avoir raison et ne font qu'embrouiller les gens ?
Hop, on brûle.
Et les romans, qui contiennent tous ces personnages inventés à qui il arrive des histoires imaginaires qui troublent l'esprit des gens, à quoi servent-ils ? Ils font certes réfléchir, mais à quoi cela sert-il de réfléchir sur le sens des choses, à part de se rendre malheureux ?
Dès lors : hop, on brûle. C'est plus sain !
Tout problème, toute idée est évacuée de la société. Les gens, à l'instar de la femme de Montag, se passionnent pour "la famille" sur la télévision murale. La famille, ce sont des gens qui s'agitent beaucoup, dont on ne comprend pas les problèmes triviaux, qui d'ailleurs se résolvent.

fahrenheit
Montag et son supérieur, dans une bibliothèque clandestine...

Voici le supérieur de Montag qui lui explique les fondements de la société.
"Nous devons tous nous ressembler. Chacun ne naît pas libre et égal aux autres, comme dit la Constitution, mais chacun est façonné égal aux autres : tout homme est l'image de son semblable, ainsi tout le monde est content. [...] Battons en brèche l'esprit humain. Qui peut dire qui sera la cible de l'homme qui a beaucoup lu ? Moi ? Je ne le supporterais pas une minute. [...] On leur [les pompiers] a donc assigné une tâche nouvelle, la protection de la paix de l'esprit, la suppression du sentiment d'infériorité aussi compréhensible que redoutable chez l'homme ; censeurs officiels, juges et exécuteurs. Voilà notre rôle, Montag, à toi comme à moi." (page 73)
Les livres, qui amènent à la lucidité et à l'inégalité, sont donc supprimés. Mais la société fournit aux gens les distractions nécessaires pour qu'ils soient heureux (sans lucidité). Toutefois, ces divertissements n'empêchent pas un grand nombre de tentatives de suicide, plus ou moins conscientes.
"Gavez les hommes de données inoffensives, incombustibles, qu'ils se sentent bourrés de « faits » à éclater, renseignés sur tout. Ensuite, ils s'imagineront qu'ils pensent, ils auront le sentiment du mouvement, tout en piétinant. [...] Ne les engagez pas sur des terrains glissants comme la philosophie ou la sociologie à quoi confronter leur expérience. C'est la source de tous les tourments. Tout homme capable de démonter un écran mural de télévision et de le remonter et, de nos jours, ils les ont à peu près tous, est bien plus heureux que celui qui essaie de mesurer, d'étalonner, de mettre en équations l'univers, ce qui ne peut se faire sans que l'homme prenne conscience de son infériorité et de sa solitude. Je ne sais. J'ai essayé. Foutaises !" (page 76).
A l'heure d'internet et de l'information disponible tout le temps et partout, de façon de plus en plus intrusive, c'est bien cela : tant d'informations disponibles... mais la perspective historique, les relations entre les faits sont-elles là, quand on sait que la capacité d'attention des gens est de plus en plus restreinte, le zapping de plus en plus rapide ? Les informations forment comme des points que plus rien ne relie.

Montag, comme son supérieur, parviendra-t-il à faire la part des choses après avoir jeté un oeil à un livre et verra-t-il que les livres ne servent à rien qu'à embrouiller l'esprit ?

fahrenheit
Ah, le plaisir de la lecture ! Notre héros, comme souvent les nouveaux "convertis", a des comportements un peu extrémistes...

Un livre très fort et, ce qui est étonnant (passé bien sûr certais aspects un tout petit peu datés, mais cela n'est pas grand-chose), de plus en plus actuel (hélas). Un classique de la SF, comme (dans un registre différent) 1984...


Bande-annonce du film de Truffaut (globalement fidèle, même si par exemple le limier Robot a été supprimé, et la menace de guerre, que l'on trouve dans le livre, est évacuée pour resserrer le propos), 1966. Julie Christie joue le rôle de la jeune fille, mais aussi celui de la femme de Montag (interprété par Oskar Werner).



Des films plus récents se sont visiblement inspirés du livre de Ray Bradbury, par exemple Equilibrium (Kurt Wimmer, 2002).

 

 

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