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STAMM, Peter
(Weinfelden, Suisse, 18/01/1963 -)

peter stamm

 

Fils de comptable, il fait lui-même des études de comptabilité, et devient comptable. Après quoi, il reprend des cours à l'Université de Zurich : cours d'anglais, d'informatique, de psychologie...
Il devient journaliste et écrivain de nouvelles, romans, pièces de théâtre (notamment radiophoniques).
Il se fait connaître avec le roman Agnès (1998).
Source : wikipedia

On pourra lire ici le compte-rendu de la lecture rencontre au Goethe-Institut de Paris le jeudi 12 janvier 2012.

 

d'étranges jardins

D'étranges jardins (Im frenden Gärten, 2003 ; 172 pages). Traduit en français par Nicole Roethel en 2004. Christian Bourgois.

Le recueil de nouvelles commence par une citation de Goethe, extraite des Années d'apprentissage de Wilhelm Meister : "Il regarda par la fenêtre et aperçut, dans un jardin voisin, une foule de gens rassemblés ; il en reconnut aussitôt plusieurs."
Je ne sais pas exactement comment il faut le prendre : peut-être le lecteur regarde-t-il par la fenêtre, voit-il quelques bribes de vies, et y reconnaît-il la sienne ?
En tout cas, c'est ce que proposent les nouvelles du recueil, jeter un oeil par cette fenêtre.

Peter Stamm se rattache ici à tout un courant d'écrivains de nouvelles, comme Carver, Cheever...

Par exemple, la première nouvelle, La visite, qui commence ainsi :
"La maison était trop grande. Les enfants l'avaient remplie, mais depuis que Regina vivait dedans seule, elle était devenue plus grande. Lentement elle s'était retirée des pièces, chacune l'une après l'autre lui était devenue étrangère et avait finalement disparu." (page 9). Puis son mari meurt.
Les enfants mènent leur vie.
"Ce dernier Noël, pour la première fois, Verena n'était pas venue à la maison. Elle était allée passer les fêtes avec son mari et Martina à la montagne, dans la maison de vacances de ses beaux-parents. Regina avait caché les cadeaux comme d'habitude au-dessus de l'armoire de la chambre à coucher, comme si quelqu'un avait pu être à leur recherche." (page 13).
Et puis pas grand-chose d'autre, juste la mélancolie d'une famille où chacun part pour vivre sa vie, les liens se relâchant inexorablement.

Les nouvelles décrivent la banalité du quotidien : un homme qui attend une femme dont l'avion est retardé par une tempête de neige :
"En fin d'après-midi, il avait commencé à neiger. Il était ravi d'avoir pris un jour de congé, car la neige était tombée immédiatement si dru qu'après une demi-heure elle recouvrait déjà les rues. Il aperçut le concierge qui balayait le trottoir devant l'immeuble. Il portait un capuchon et, sur son petit îlot obscur, menait une bataille perdue d'avance contre la neige qui tombait sans discontinuer.
Quelle bonne idée qu'il ne fût pas allé, cette fois, la chercher en voiture à l'aéroport.
" (début de la nouvelle Toute la nuit, page 55)

On y trouve également un auditeur qui parcourt le monde et qui revoit les mêmes gens année après année, mais à qui l'on demande brusquement un service, un petit moment à Lisbonne, un expatrié (du boulot) qui s'installe à Londres. Parfois, il y a un semblant de scénario (L'expérience).

Le style est simple sans être simpliste, il y a très peu de descriptions, de couleurs, de sons, de sensations en général. On pourrait dire que Peter Stamm a un style factuel : il ne cherche pas particulièrement à créer d'empathie avec ses personnages, mais ne cherche pas non plus à créer une distance artificielle. Il décrit juste ce qui se passe. Les personnages sont vus de l'extérieur, on ne sait pas souvent ce qu'ils pensent.

Ses nouvelles sont intéressantes car il parvient à donner l'impression que, derrière un embryon d'histoire banal, il y a autre chose de plus profond, le mystère de la vie, quelque chose comme ça : la solitude, le départ des êtres, chacun vers son destin propre. Ce n'est pas triste, juste mélancolique : c'est la vie.
C'est très léger, les nouvelles tiennent par leur atmosphère, plus que par leur histoire - ce sont à peine des situations - et la conséquence en est que ces nouvelles, une fois lues, ont une forte tendance à se décomposer dans la mémoire. En partance vers leur destin propre, sans doute.




paysages aléatoires

Paysages aléatoires (Ungefähre Landschaft, 2001 ; 221 pages). Traduit en français par Nicole Roethel en 2002. Christian Bourgois.

Le roman s'ouvre par une citation de Paul Celan : "Toi, sois comme toi, toujours".
C'est ce que va faire l'héroïne du livre. Dit ainsi, cela peut paraître bateau, mais comme toujours, il y a l'art et la manière d'en rendre compte et, in fine, c'est plutôt bien fait.
A propos de bateau, il y en a dans ce roman qui se déroule en Norvège.
Kathrine est employée des douanes dans une petite ville, plutôt un village : elle remplit des papiers, monte dans les bateaux, les inspecte, cherche les produits de contrebande. Comme on est au nord de la Norvège, on ne voit pas le bout du nez du soleil en hiver, il fait froid, il neige.
Elle s'est mariée une première fois. Elle a un enfant. Mais son mari boit, il la frappe, elle le quitte et vit avec son fils.

"Maintenant en avril, la nuit n'était plus aussi sombre. Kathrine s'était levée tôt, bien que ce fût samedi. Elle réveilla l'enfant, lui fit prendre son petit-déjeuner et le conduisit chez sa grand-mère. Elle retourna chez elle, chaussa ses skis et s'en alla. Elle suivit les traces des motoneiges jusqu'à la première butte, puis celles de la ligne de courant qui menait jusqu'à l'antenne radio. Finalement, après une heure environ, elle s'écarta à angle aigu de cette dernière trace et s'élança dans l'immensité du fjeld." (page 9).
Elle va au phare, elle n'en repartira que le lendemain. Elle aime écouter les gardiens du phare.
"Ils parlaient alors beaucoup, lui racontaient des histoires de temps immémoriaux, lui parlaient de personnes mortes depuis bien longtemps ou parties vivre ailleurs. Ils racontaient toujours les mêmes histoires, parlaient sans discontinuer et, pourtant, étaient aussi moroses que le paysage." (page 15).
"Il neigeait souvent, et il faisait sombre et froid. Le père de Kathrine mourut, il ne se réveilla pas un matin. Il n'était pas encore vieux. Le pasteur était venu et s'était assis avec sa mère dans la cuisine. Kathrine avait fait du café, puis avait pris l'enfant par la main et était rentrée chez elle. Le pasteur et sa mère étaient toujours assis en silence à la table de la cuisine." (page 11).

Katrhine se remarie avec Thomas.
"Thomas savait ce qu'il voulait. Quand il commença à parler de mariage, Kathrine n'y avait pas même encore songé. Son existence s'effilochait au gré des paysages aléatoires dont sa vie était faite. Pareille à ces pistes jalonnées de piquets qu'empruntent les traîneaux dans la neige, sa vie à lui avait une direction et un but. [...]
Elle n'avait jamais dit qu'elle l'aimait. Et elle ne lui dissimulait rien. S'il voulait savoir quelque chose, il n'avait qu'à lui demander. Mais il ne l'interrogeait jamais sur sa vie passée. Elle n'était même pas certaine qu'il sache que Helge avait été son premier mari. Ce que je ne sais pas !... disait-il parfois en riant.
" (pages 32-33).
Thomas est extérieurement un type trop parfait. Bien sûr, il ne l'est pas. Il est obscurément désagréable, même si tout le monde le trouve très sympathique.

Kathrine, qui contrôle les bateaux, n'a jamais franchi le cercle polaire. Elle va vouloir voir un peu de pays, tout plaquer. Elle est un peu déboussolée.

Certains écrivains en font des tonnes. Peter Stamm, lui, parvient à créer des personnages avec un minimum d'effets.
Le roman est comme un film nordique tel qu'on se l'imagine, sans musique pour souligner les états d'âmes des personnages le lecteur est assez grand pour les deviner. Pas de fioritures, donc.
Et, malgré ce qu'on pourrait croire, le roman n'est pas sinistre ou dépressif, il est finalement plutôt positif.
L'histoire d'une femme qui arrive à être elle-même, parce que jusqu'à présent, elle avait cherché à être une autre, volontairement ou non. Et c'est là qu'elle en arrive : à réaliser qu'à force de ne pas décider vraiment, elle est devenue quelqu'un d'autre.
Enfin, je crois.

Un roman vraiment pas mal, qui se lit vite.

A noter une phrase qui a l'allure d'un slogan rimé, que l'on pourrait peut-être revendre une fortune à une marque de café : "Elle dit, un café le matin chasse soucis et chagrins." (page 188).

 

 





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