Littérature Japonaise
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"Né en 1940.
Il doit s'agir d'un gros plan inversé de : - Courtisanes du Japon (2001). Textes traduits et présentés par Jean Cholley. Picquier poche. 222 pages. Dans son introduction, Jean Cholley commence par brosser les conditions de la création de Yoshiwara.
"Le nouveau Quartier fut ouvert en 1657, sous la forme d'un rectangle de quelque 330 mètres d'est en ouest et de 220 mètres du nord au sud, soit une superficie d'un peu moins de dix-huit hectares. Les murs d'enceinte surplombaient à l'intérieur un fossé d'eau noirâtre, en fait les eaux d'évacuation du Quartier, qui au début avait une largeur de 9 mètres ; appelé o-haguro-dobu, « fossé de la teinture de dents », en raison de sa couleur [car les Courtisanes - notamment - se noircissaient les dents], il servait aussi, par sa dimension et sa puanteur, à décourager l'évasion des courtisanes ou éventuellement de personnes suspectées par la police. Les filles du plus bas niveau et les moins chères du Quartier tenaient leur antre près de ses rives." (page 11). "[...] des établissements proposaient en devanture des courtisanes de bonne tenue, exposées à l'appréciation des badauds derrière des claies de bois : le client faisait son choix puis entrait dans la maison pour discuter des modalités avec le patron." (page 13) Les Japonais adorent tout catégoriser. Les courtisanes étaient donc également catégorisées en fonction de leur rang. Celles du rang le plus élevé - les courtisanes tayû - étaient vingt-cinq vers 1660. Seuls les "grands du régime étaient assez fortunés pour pouvoir s'offrir leur compagnie." (page 14). Après les années 1760, il n'y en avait plus, les critères étant trop stricts (beauté, maintien, connaissances en chant, musique instrumentale, cérémonie de thé, littérature, etc.). Déjà à l'époque, on pouvait dire que c'était mieux avant...
Suivaient d'autres catégorie, dont les tarifs étaient de moins en moins élevés : kôshi (qui n'apparaissaient pas publiquement, mais que l'on choisissait sur le Catalogue ; de plus elles devaient donner leur approbation), puis sancha, ...
"Avec le Catalogue Le commentaire de Jean Cholley explique que le mari part officiellement pour le lointain Izumo... "La première - et seule - étape de sa pérégrination sera Yoshiwara, où il a décidé de passer le mois entier que lui aurait pris le véritable trajet, et de dépenser toutes ses économies secrètes." (page 35). "Les courageux, les rustres ou les amateurs tragiquement légers d'argent couvraient à pied le chemin conduisant à Yoshiwara. Les véritables connaisseurs n'avaient que mépris pour cette barbarie, et nul n'aurait osé lancer une invitation qui commençât par une longue marche." (page 39). "Que ça dure longtemps Mais ça secoue drôlement !... ... ou bien en canot, “« [...] qui ne pouvait prendre qu'un passager, avec devant lui un plateau de nécessaire à tabac. Le client se retenait de toutes ses forces aux bordages pour assurer son équilibre, car les rameurs allongeaient la nage de façon dissymétrique et le canot roulait violemment ; il fallait donc accompagner les mouvements en souplesse, car le passager qui se raidissait de peur prenait le mal de mer et subissait force moqueries de la part des rameurs.[...]»" (citation d'un livre d'un certain Mitamura Engyo (1870-1952). (page 47). "Installé en broche
Plus qu'un kilomètre à parcourir sur un remblai (la Digue) pour enfin parvenir à Yoshiwara, qui est tout à côté de temples. On peut donc accompagner un convoi funéraire. Cela fait très certainement réfléchir sur la vanité de toute chose... mais être aussi bien pratique en cas de rencontre fortuite avec une connaissance : "Excuse sur la Digue : D'une manière générale, c'est une excuse fort pratique : un mari dit à sa femme qu'il doit aller aux funérailles d'un membre de sa confrérie. Or, le temple Shôtô ne se situe qu'à cinq cent mètres de Yoshiwara... "« Si haute gratitude Les sûtras en question, ce sont les pages du Catalogue ! "O funeste temps !
Très amusant : les maisons de thé, qui bordent la Digue, permettent de boire (du thé... et des boissons plus fortes), mais aussi de louer des vêtements : on ne va tout de même pas entrer à Yoshiwara en vêtements de deuil ! "Stupide médecin, Eh oui, la tenue de médecin ne fait pas toujours le moine ! Des surveillants sont là pour empêcher les courtisanes de s'enfuir. Elle cherchent parfois à se déguiser. " Toi le beau garçon, On apprend également d'où proviennent les filles. "Les filles arrêtées Mais la quasi-totalité des courtisanes ont été achetées fillettes, entre huit et douze ans et entraient en apprentissage. Ce sont des "personnages à l'appellation désopilante d'« intermédiaire en relations humaines »" (page 84) qui se chargeaient d'approvisionner les maisons. Ils vont acheter ces fillettes auprès de familles plongées dans la misère qui, ne pouvant nourrir leurs enfants, doivent se résoudre à en vendre. Un bon cataclysme, des mauvaises récoltes quelque part, et ce sont des occasions en or qui se présentent, il faut y aller ! "Maquereaux et maquerelles
Le lecteur va suivre le cérémonial des trois rencontres nécessaires au client éclairé pour parvenir à ses fins : la courtisane garde un air renfrogné, ne parle pas et ne reste que très peu de temps lors de la première rencontre, au cours d'un repas très onéreux ; la deuxième rencontre est à peine meilleure, puisque la courtisane reste un peu plus longtemps et ne dit que quelques mots. La troisième rencontre sera plus satisfaisante. "Le premier commis De plus, le client d'un établissement ne devait surtout pas fréquenter un autre établissement : il risquerait alors une punition. La courtisane doit toujours penser qu'il lui faudra se faire racheter par un riche client, ou bien trouver un point de chute, un protecteur, pour après. Car, à vingt-sept ans, après dix ans de service (généralement d'enfer), elle est libérée.
"Lieu d'exécution Que faire du petit doigt reçu ? Et, pour la courtisane, comment dissimuler l'absence de son petit doigt, qui en dira long sur son passé ? Mais si, malgré tout, il n'est pas possible de trouver un point de chute, il reste encore une solution : rester. "[...] les établissements ne manquent pas où l'on recherche une surveillante générale (yarite) dont les connaissances professionnelles sont garanties, et qui aura à coeur de se venger de ce qu'elle a subi. Stupeur au premier, Bien sûr, tout ceci n'est valable que pour les établissements de luxe. Ceux où le client choisissait les courtisanes derrière les treillis de bois, ou bien ceux près du Caniveau du Quartier ne nécessitaient pas tout ce cérémonial, et l'on parvenait à ses fins très rapidement.
Yoshiwara a fermé définitivement en avril 1958. Un livre vraiment très intéressant qui nous plonge dans un monde ultra-codé, fascinant, cruel.On pourra par exemple poursuivre l'exploration du monde de Yoshiwara avec Les Mystères de Yoshiwara, de Matsui Kesako.
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