Livre.gif (217 octets) Littérature Japonaise Livre.gif (217 octets)



-
dictées

- listes
- liens recommandés


Papillon.gif (252 octets)

-> retour Japon <-

retour
page d'accueil

 


KOJIMA Nobuo

(Gifu, 28/02/1915 - 26/10/2006)

kojima nobuo

Professeur de littérature à l'Université de Meiji, il a publié des nouvelles et des romans.
Prix Akutagawa 1954 pour L'Ecole Américaine (Amerikan Sukûru) ; prix Tanizaki 1965 pour Le Cercle de Famille (Hôyô Kazuku).

 

le cercle de famille

Le Cercle de Famille (Hôyô Kazuku, 1965, 231 pages, Editions Philippe Picquier, traduit par Elisabeth Suetsugu).

Miwa Shunsuke, 45 ans, est un père de famille. Il a un fils et une fille. Sa vie avec sa femme, Tokiko, est assez tendue :

"« Hé ! Tokiko, qu'est-ce que tu as décidé pour le voyage dont je t'ai parlé l'autre jour ? Tu ne viens pas avec moi ? »
Tokiko évita son regard. Puis, se tournant vers Michiyo [il s'agit de la femme de ménage ] :
« Vous vous rendez compte, le voilà qui me propose de m'emmener ! Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'une fois n'est pas coutume ! »
Puis elle ajouta, dévoilant ainsi son refus :
« Mais je n'irai pas pour un empire ! Parce que vous savez, se retrouver seule en compagnie de l'homme que vous voyez là n'a rien de plaisant !
- Voyons, Madame, vous devriez y aller ! Moi qui n'ai plus mon mari, je vous envie ! Un voyage à deux est une excellente chose pour un couple mûr ! » déclara Michiyo d'une voix cajoleuse.
En entendant la voix de cette femme entre deux âges, Shunsuke pensa une fois de plus que sa maison était comme souillée.
" (page 5-6).
Dès le début du roman, il est question de maison.

"
Deux ou trois jours plus tard, Shunsuke partit pour aller donner une conférence. Elle était destinée à un public composé de femmes au foyer et devait être suivie d'un débat. Parallèlement à son travail d'enseignement à l'université, Shunsuke traduisait en japonais des ouvrages de littérature étrangère, et deux ans plus tôt, il avait été reçu dans une université américaine en qualité de traducteur et présentateur de la littérature japonaise. Depuis son retour d'Amérique où il avait passé un an, il publiait des écrits sur la vie américaine et avait été peu à peu amené à participer, bon gré mal gré, à des manifestations de ce genre." (pages 10-11).

Les quatre-vingt premières pages du roman sont essentiellement une suite de prises de becs entre le mari et la femme, regrets, récriminations, jusqu'aux petites humiliations quotidiennes (pour aller dans son bureau, Shunsuke est obligé de traverser la chambre de sa femme), reproches d'ordre sexuels ("Le mari dont la femme se conduit de cette façon, c'est bien parce qu'il n'est pas capable de la satisfaire, non ?" dit Tokiko à son mari, page 21 ; "Au fait, je profite de l'occasion pour te dire que j'ai toujours été insatisfaite, figure-toi ! C'est vrai, je n'ai jamais été une femme comblée ! cria-t-elle." page 30).

La présence de George, un militaire américain - l'élément le plus étranger au cercle de famille - qui s'est incrusté chez eux, exacerbe encore plus les tensions.
"Si j'étais jeune, j'aurais quitté la maison pour le suivre en Amérique ou ailleurs, peu importe, tu peux me croire !" dit encore Tokiko à son mari (page 31).

Le constant souci de Shunsuke semble être de conserver l'unité de la famille, de sauver ce qui peut l'être, et notamment les apparences. "Pour que son foyer retrouve des jours paisibles, il lui faudrait sans doute se plier à des choses qu'il jugeait ridicules." (page 64)

Tout est prétexte à dispute :
"Dis-moi plutôt ce que tu veux manger ce soir ! demanda Tokiko en poussant un profond soupir.
- Tout ce que je demande, c'est que nous nous retrouvions ensemble à table, tous réunis, et je n'ai aucun souhait à formuler sur la nourriture !
- Si je comprends bien, Monsieur voudrait se régaler d'ambiance familiale !
" (page 69).

Le couple fait chambre à part.
Tokiko dit à son mari : "Je sais que tu voudrais que nous ayons la même chambre, mais ça ne durerait pas longtemps. Quand tu te seras satisfait, tu ne seras pas long à éprouver l'envie d'aller dormir seul ! D'ailleurs, je te défie de pouvoir rester près de moi ! Dès que j'essaie de dire quelque chose, ne cherches-tu pas tout de suite à me fermer la bouche ? Tu n'as pas la moindre velléité d'accorder une oreille à ce que peuvent dire les gens !" (page 41).

La vision du couple est bien sombre. Comme le dit quelqu'un, page 155 : "[...] bien que ce soit certainement pénible, le conjoint n'est jamais qu'un étranger, à y bien réfléchir...
- C'est juste.
" (dit Shinsuke).

Toute demande de Tokiko est analysée au filtre de l'humiliation et de la domination. Ainsi :
"Quelles raisons l'avaient poussée, après leur retour de la mer, à déclarer brusquement son intention de faire construire une maison, l'obligeant, lui à trouver l'argent, pour arriver à ses fins en l'espace de six mois ? Où était le lien ? Etait-elle à la recherche du « bonheur familial » ? Avait-elle agi dans le désir d'affirmer son pouvoir ?" (page 30).

Avec la construction de la nouvelle maison se poursuit la décomposition familiale. Est-ce parce que la nouvelle maison va disposer de tout le confort moderne, et que tout est très symbolique dans le roman ? La maison, dont l'architecture se veut un modèle de communication familiale, se révèle en fait inhumaine.

Que dire de ce roman ? Il a pour lui de ne pas chercher à plaire avec une jolie histoire. Si vous aimez les scènes de la vie conjugale et les pièces de Tennessee Williams, que vous voulez passer un bon moment avec un couple qui se déchire, lisez ce livre, vous ne devriez pas être déçus !

Murakami Haruki a dit, dans une interview : "Le roman Hôyô Kazuku (Le Cercle de famille) de Kokima est mon roman préféré et je l'ai lu sept ou huit fois. Pourtant, son univers romanesque mereste en partie insaisissable. Le première fois que je l'ai lu, j'ai trouvé que c'était un roman bizarre. Je me suis même dit qu'il était peut-être raté. Pourtant, j'ai continué à y penser et quand je l'ai relu, j'ai fini par être intéressé. Je pense que ce roman comporte de nombreuses facettes ; on peut peut-être dire la même chose de Chroniques de l'oiseau à ressort." (Ozaki Mariko, Ecrire au Japon, le roman japonais depuis les années 1980, page 54)

Egalement disponible en français :
- Le fusil (Shôjû), nouvelle, dans Anthologie de nouvelles japonaises contemporaires, Tome II, NRF, Gallimard.


Non disponibles en français :
- L'Ecole Américaine (Amerikan Sukûru, 1954)
- Une Famille étroitement unie (Hôyô kazoku, 1965)
- L'Hôte venu de la province (Onoborisan, 1970)
- Raisons de se séparer (Wakareru riyû, 1982). Prix Noma, "long roman , d'une écriture avant-gardiste" (Ozaki Mariko, Le roman japonais depuis les années 1980, Editions Philippe Picquier, page 22).

- Retour à la page Littérature japonaise

 

Toute question, remarque, suggestion est la bienvenue.MAILBOX.GIF (1062 octets)