Livre.gif (217 octets) Littérature Latino-américaine Livre.gif (217 octets)



-
dictées
-
littérature
- listes
- liens recommandés


Papillon.gif (252 octets)

-> retour
Littérature latino-américaine
<-


Autre littérature :

Littérature japonaise

retour
page d'accueil

 


NETTEL Guadalupe
(Mexico, 1973 -)

 

Guadalupe Nettel est née à Mexico en 1973.
Elle vit à Barcelone.
Elle est souvent considérée comme l'un des écrivains latino-américain à suivre.

- L'Hôte. (El Huésped, 2006, traduit de l'espagnol par Marianne Millon). Actes Sud. 234 pages.

La photographie de couverture est de Manuel Avarez Bravo, El ensueno (Le Songe, détail, 1931).
Voici la photographie originale :

"J'ai toujours aimé les histoires de dédoublement, celles où un alien surgit du ventre d'un personnage, ou celles où il lui pousse un frère siamois dans le dos. Quand j'étais petite, j'adorais ce dessin animé dans lequel un coyote descend la fermeture Eclair de son pelage de grand méchant loup pour se transformer en petit agneau prétendument naïf. Je savais qu'en moi aussi vivait une chose à la forme déterminée qui jouait quand je jouais, mangeait quand je mangeais, était enfant quand je l'étais. J'étais sûre que La Chose allait se manifester un jour [...]. Tout changement inexplicable de mes états d'âme, tout emportement, pouvait être un signe. A l'époque, je ne savais que très peu de chose sur cet hôte intérieur. Je savais que sa respiration était semblable à un poulpe, qui déployait, la nuit, ses tentacules poisseux dans ma chambre ; je savais que rien ne la blessait tant que la lumière et que si elle parvenait un jour à prendre le dessus elle me condamnerait à l'obscurité la plus absolue ; en résumé, je savais que c'était ma pire ennemie. [...]" (page 17).
Le livre commence plutôt bien. On pense à des oeuvres de SF (on peut citer la nouvelle Le Parasite, d'Arthur C. Clarke).

"Mais à peine entrai-je dans l'adolescence qu'elle s'appropria les meilleures facettes de mon caractère, me dépouillant même de mes dons les plus cachés. C'est pour cette raison que je suis aujourd'hui une personne sans qualités et que les gens ont du mal à me supporter." (page 17).
Voyons... Dépouiller des dons les plus cachés... Que veut-elle dire par là ? On ne le saura malheureusement pas. Ou alors je n'ai pas compris. Ils devaient être vraiment bien cachés, ses dons.

Ça continue pas mal : "Le premier territoire envahi fut celui des rêves ; peu à peu, entre dix et douze ans, ils perdirent couleur et consistance. Je me mis à rêver dans des tons pastel, puis fusain, telles les esquisses sales d'un dessinateur manquant de métier." (page 18).
"
A compter du mois de juin, et non sans raison, je crois, je commençai à avoir peur de moi-même. Peur de La Chose que je sentais grandir en moi comme une chrysalide ; peur des changements qui se produisaient dans mon corps ; et peur, surtout, des actes que je pouvais commettre à mon insu." (page 25).
Ana, la narratrice, a 10 ans. Son frère adoré, Diego, en a 9. La Chose, dès le début du livre, s'en prend au frère. Comment exactement ? Ce n'est pas clair. Un peu comme une possession, un sortilège. Ce qui n'a rien à voir avec une "simple" personnalité qui cherche à prendre le dessus. On est là dans le domaine du fantastique.

"[...] une fois qu'elle m'aurait enfermée dans le cachot où je la tenais jusqu'alors, mon existence serait réduite à celle d'une amibe. Quand cela se produirait, je deviendrais son côté obscur, sa honte, son parent pauvre. Les rôles s'inverseraient sous la consigne tonitruante du « rira bien qui rira le dernier », et Dieu sait si La Chose a un rire terrifiant, désarticulé comme celui d'un roi devenu fou. Pendant les nuits de mon enfance, crispée sous les draps, j'appris à le détecter, et je l'entends encore aujourd'hui, bien qu'il ne puisse plus me toucher en aucune façon. L'autre fin, la mort orthodoxe, ne serait rien d'autre qu'une libération." (page 28).

Oui, il est bien écrit "bien qu'il ne puisse plus me toucher en aucune façon." Eh bien, je n'ai pas compris pourquoi. Là encore, au vu de la fin, ce n'est pas clair.
Ce qui est clair, par contre, c'est que l'auteure s'est bien rendu compte qu'elle ne pourrait pas tenir tout un roman sur la guerre entre Ana et La Chose. Dès la page 70, sous couvert de nous parler de cette lutte, des préparatifs, l'histoire dévie.
La Chose semble craindre la lumière ? Il faut donc qu'Ana en sache plus sur les aveugles (on avait bien dit que l'histoire n'était pas claire). Et exit La Chose, pour longtemps. Oh, elle est toujours là, en fond, Guadalupe Nettel nous le rappelle de temps à autres. Mais concrètement, que fait-elle, cette Chose, passé le début du roman ? Rien.
Le livre pourrait aussi bien parler d'autre chose (et c'est peut-être de cela qu'il parle) : l'acceptation de son "vrai moi"(si cela a une signification), même si, pour cela, il faut quitter la société telle qu'elle existe (il faut avoir lu le livre pour comprendre, ou bien avoir parcouru la quatrième de couverture, bien bavarde, comme d'habitude).

Le livre commence par "Un grand merci à mon amie Svetlana Doubin pour sa fine relecture".
Soit. Alors, je m'interroge. Page 87, Ana sort de l'institut où elle travaille. On lit : "Lorsque enfin j'arrivais devant ma voiture [...] Je sortis la clé de mon sac".
Stupeur du lecteur. Jusque là, elle y allait à pied, vu que c'est près de chez elle. Page 184, on lit d'ailleurs : "J'arguai que je n'avais pas le permis [...]".

Qu'est-ce à dire ?
Que le livre, qui paraît simple (mais pas clair) est en fait une brillante alternance de personnalités, sans que le lecteur (enfin, moi) ne s'en aperçoive ?
Mais non... La Chose n'aurait pas pu s'acheter une voiture sans que notre héroïne ne le sache, quand même ?
Et, encore une fois, au vu de la fin, que je ne peux pas rapporter ici, pourquoi l'auteur écrit, au début, "bien qu'il ne puisse plus me toucher en aucune façon" ?
Je n'ai pas compris. J'espère tout de même qu'il y avait vraiment quelque chose à comprendre, et qu'il ne sagit pas juste d'une histoire, certes bien racontée, mais bancale.

petales
illustration de couverture de Nicoletta Ceccoli

- Pétales et autres histoires embarrassantes. (Pétalos y otras historias incomodias, 2008). Nouvelles traduites de l'espagnol en 2009 par Delphine Valentin. 142 pages. Actes Sud. La quatrième de couverture dit que ce recueil a obtenu, au Mexique, les Prix Gilberto Owen et Antonin Artaud.

Le recueil de six nouvelles commence par deux citations :
"Etres imparfaits vivant dans un monde imparfait, nous sommes condamnés à ne jamais connaître que des miettes de bonheur." Julio Ramon Ribeyro, La Tentacion del fracaso
"- En quoi consiste la beauté du monstre ?
- Dans le fait qu'il l'ignore." Mario Bellatin.

1/ Ptôse (19 pages)
Le père du narrateur est photographe. À la suite d'un accord avec un chirurgien parisien spécialisé dans les paupières, il photographie ses clients, avant et après l'opération. Le narrateur s'y est mis aussi, il aide son père.
"Cette partie du corps, que j'ai vue toute mon enfance, et sans jamais ressentir le moindre dégoût, a fini par me fasciner. Exhibée et cachée par intermittence, elle oblige à rester en état d'alerte si l'on veut découvrir quoi que ce soit qui en vaille vraiment la peine." (page 17). Le narrateur est fasciné par "les paupières insolites que de temps en temps je repère dans la foule" (page 17)
Après l'opération : "En apparence, les yeux sont désormais mieux équilibrés, mais quand on y regarde de plus près - et surtout quand on a déjà vu mille visages modifiés par la même main - on découvre quelque chose d'abominable : d'une certaine façon, ils se ressemblent tous. C'est comme si le Dr Ruellan laissait une marque distinctive sur ses patients, un sceau ténu mais qu'on ne peut confondre." (pages 18-19)
Très bonne nouvelle, la fascination, quasiment le fétichisme, d'une partie du corps fait penser à Ogawa Yoko.

2/ Transpersienne. Petite nouvelle (5 pages), pas mal écrite, sur du voyeurisme. Ça se lit sans ennui.

3/ Bonsaï (25 pages). La narrateur est un homme marié qui a l'habitude de se "promener les dimanches en fin d'après-midi dans le jardin botanique d'Aoyama." (page 37). On est donc au Japon. "Je pouvais ainsi longer les grandes fontaines, parcourir les rangées d'arbres qui se trouvent dans la cour et, s'il y avait du soleil, m'asseoir sur l'un des bancs pour lire." (page 37).
Un jour, il va se mettre à s'intéresser aux plantes, et cet intérêt va changer sa façon d'être, son comportement, sa vision des autres.
Très bonne nouvelle.

4/ L'Autre côté du quai.
"Au fil des ans, j'ai entendu toutes sortes d'avis sur la Véritable Solitude ; c'est un thème qui revient dans nos dîners de famille, ce genre de conversations dans lesquelles il convient de ne pas exprimer d'opinion sincère, comme sur les sujets d'actualité ou les questions morales, car le plus probable est qu'on finisse par s'enliser dans les prodigieux fibromes du malentendu." (page 65). La narratrice se replonge dans un souvenir, pas très intéressant au bout du compte. 19 pages, c'est un peu long.

5/ Pétales. La nouvelle qui donne son nom au recueil.
Un homme fréquente les toilettes pour dames des restaurants dans lesquels il n'est même pas client. Il parvient à s'y introduire, ni vu ni connu, et il examine les traces laissées. "[...] je préférais découvrir les femmes dans le seul lieu où elles ne se sentaient pas observées : les toilettes. Ici, quand on a appris à décrypter, une simple trace liquide glissant sur la paroi blanche peut révéler une dépression nerveuse ou une contrariété récente. Il y avait toujours quelque chose à découvrir, une réaction nouvelle capable de déclencher en moi l'euphorie du novice, mais entre toutes ces inconnues, qui s'avéraient des défis stimulants pour s'exercer à l'interprétation, aucune ne me déconcerta autant que la Fleur". (page 89).
15 pages très, très longues. Pris d'ennui, les divers relecteurs ont dû penser à autre chose : "[...] et même si je pourrais reconnaître la teinte précise [...]".

6/ Bézoard.
Cette nouvelle, comme d'autres, s'ouvre par une citation (le recueil était déjà placé sous le signe de deux citations, ça fait peut-être beaucoup, mais bon) : "L'autre panacée à laquelle on peut avoir recours est la pierre de bézoard. Cette pierre est constituée de sécrétions qu'on trouve dans l'estomac de certains animaux qui ingurgitent leurs propres poils, dans une région précise de l'Inde, et l'on dit qu'elle soigne de la mélancolie et de la jaunisse et qu'elle est un antidote à toutes sortes d'empoisonnements." Ambroise Paré, Les Discours.
C'est le journal de la narratrice, dont le plaisir pathologique consiste à s'arracher les poils, cheveux et autres, si possible avec la racine, miam. Elle est dans une clinique psychiatrique. Elle raconte son plaisir, comment elle en est arrivée là.
C'est beaucoup trop long : 38 pages pour pas grand chose. "J'y viens, docteur, mais il va falloir être patient car je ne veux oublier aucun détail important". (page 118). Il faut aussi de la patience de la part du lecteur.


Est-ce que toutes ces histoires peuvent vraiment être qualifiées d'embarrassantes ? Pas sûr. On ne voit pas toujours pour qui ce serait embarrassant. Enfin, ça fait une jolie deuxième ligne sur la couverture.

Le recueil serait très bien avec les seules trois premières nouvelles.
Apparemment, Guadalupe Nettel a du mal à tenir la distance sur des textes un peu longs. Si ce qu'elle a à dire ne permet pas d'allonger la sauce, pourquoi le faire et gâcher ainsi des textes ? C'est vraiment dommage, car elle semble avoir du potentiel.

 



- Retour àla page Littérature latino-américaine -

Toute question, remarque, suggestion est la bienvenue.MAILBOX.GIF (1062 octets)