Littérature Portugaise
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"D'une famille de médecins, il s'oriente d'abord vers la psychiatrie, et sa formation médicale lui vaudra de faire deux ans de service militaire en Angolas, de 1971 à 1973." (Le Cul de Judas, page 7).
- Le cul de Judas (Os Cus de Judas, 1983, traduit du portugais en 1983 par Pierre Léglise-Costa). Editions Métailié, 214 pages. On commence par une présentation (de qui ? éditeur ? traducteur ?) : "A Lisbonne, une nuit, dans un bar un homme parle à une femme. Ils boivent et l'homme raconte un cauchemar horrible et destructeur : son séjour comme médecin en Angola, au fond de ce « cul de judas », trou pourri, cerné par une guerre sale et oubliée du monde. Un humour terrible sous-tend cet immense monologue qui parle aussi d'un autre front : les relations de cet homme avec les femmes. Après quoi nous avons quelques repères historiques sur Salazar, l'Angola, les mouvements rebelles, etc. Souvenirs d'enfance, donc. Par exemple du jardin zoologique : "Je ne sais pas si ce que je vais vous dire vous paraîtra idiot, mais, le dimanche matin, quand nous y allions, avec mon père, les bêtes étaient encore plus bêtes, la solitude de spaghetti de la girafe ressemblait à celle d'un Gulliver triste et des stalles du cimetière des chiens montaient, de temps en temps, des glapissements affligés de caniche." (page 11).
Le livre demande une bonne attention, et un bon temps de cerveau disponible (pour mon cerveau, en tout cas).
Antonio Lobo Antunes à la librairie Les cahiers de Colette. C'était le jour de la remise du Nobel de Littérature. C'est Herta Müller qui l'a eu, honte sur moi, je ne la connaissais pas... Sur le chemin vers la librairie Les cahiers de Colette, il y a une librairie Allemande. Pas trace de Herta Müller non plus. Antonio Lobo Antunes arrive, et je n'ai pas de calepin pour gribouiller un compte-rendu correct, ce n'est pas bien. La librairie n'est pas très grande, il faisait vraiment chaud, j'étais près d'Antunes, sur le côté. (bon, on ne voit pas ses yeux très bleus, limpides comme de l'eau) Il s'exprimait dans un très bon Français, comme il aurait pu le faire en Espagnol, en Anglais, en Allemand (sa première langue, apparemment ; sa famille vient d'horizons multiples, Brésil, Allemagne, Italie, je crois même… mais ça ne fait pas de différence… "sauf ma grand-mère, qui était très, très Allemande" ; à propos de l'Allemand : c'est une langue intéressante, on peut construire des mots, ce que l'on ne peut pas faire en Portugais ou en Français… Le Français est une langue peu souple, il en admire d'autant plus Stendhal, Flaubert, Céline). La personne qui devait le présenter et lui poser les questions, tenter d'animer le débat n'était pas là (pour cause d'enterrement), une autre femme (qui travaille chez Christian Bourgois, je crois) s'y colle. Il y a une collection de livres pour lesquels Antunes écrit une petite introduction (du genre : une page de présentation), et grâce à son nom, cela fait vendre, de la même façon que Borges, en son temps, avait dirigé la collection Bibliothèque de Babel (Meyrink, Machen, etc.). "En Espagne", a dit la présentatrice qui a continué à marquer des mauvais points (elle intervenait pour placer un synonyme à ce que Antunes disait, ce qui l'interrompait et n'apportait rien, jusqu'à un "vous allez me laisser parler" dit quasiment à la fin). A propos des écrivains, du fait de rencontrer les écrivains, ce n'est pas très intéressant : écrire, c'est leur travail. Quand il était enfant, dans une famille de médecins, ça parlait toujours médecine à table, et c'était très ennuyeux. On lui a proposé de rencontrer Kundera, mais il n'a pas voulu : que lui dire, à Kundera ? Au-delà du "j'aime beaucoup ce que vous écrivez", que dire à un écrivain ? Globalement, les questions posées par la présentatrice étaient assez inintéressante, elle était à la peine. Une autre personne lui a demandé s'il était difficile de parler de ses livres une fois que le temps a passé (il a écrit trois autres livres depuis celui qu'il était venu présenter). Il a parlé de plein de choses, de sa famille, du fait qu'on ne choisit pas ses frères, qu'il ne se confie pas à eux, que ses amis, ce sont ses frères choisis. Qu'on s'érige souvent contre ses parents. A la fin, il a dédicacé, ce que apparemment il fait très peu. Il se contente généralement d'une conférence de presse pour la sortie de ses livres, ne fait jamais de lectures et peu de dédicaces. Apparemment (je ne l'ai pas encore lu) il est notamment question d'une enfant, d'une fille qui se suicide. Il a vraiment connu la fillette, belle, brillante, elle avait l'avenir devant elle… La mère dit à la fille d'aller jouer dehors, dans le jardin… puis vient l'heure du goûter, elle l'appelle, la fille ne répond pas. Elle s'était pendue. Antonio Lobo Antunes était plus que très intéressant, son propos passait d'un sujet à l'autre, comme dans ses livres. Ah, il a dit qu'un jour, il était fatigué d'écrire. Il prend un livre au hasard, l'ouvre. Dickens, "Hard Times". Il lit : Et d'embrayer sur Dickens, et les auteurs qui, au début, étaient "engagés". Quand un écrivain dérange les autorités en place, les classes dirigeantes, il est adopté. C'est la manière la plus sure de lui faire perdre sa dangerosité. C'est arrivé à Dickens, comme à d'autres grands écrivains. Il est 19h30, j'ai mon livre dédicacé, avec un jolie couverture d'Odilon Redon. et direction le métro. |
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