Littérature Portugaise
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Voir la biographie et les critiques de livres de Gonçalo M.TAVARES, ici. La rencontre se déroule à la librairie L'Écume des Pages (174, boulevard Saint Germain, 75006 Paris, le 15 octobre 2010 à 19 heures), à l'occasion de la sortie de Monsieur Brecht et le succès, et de Apprendre à prier à l'ère de la technique. En plus de la présence de Tavares, Claude Aufaure, un comédien, doit lire des textes. J'arrive un peu en retard… problème de transports. J'aurais dû partir plus tôt. Quand j'arrive, Claude Aufaure est en train de lire des extraits de différents livres du cycle "O Bairro". (Le Quartier) : Monsieur Kraus, Monsieur Brecht (Le Malappris, le Bagne). Souvent, l'assistance rit ou réagit avant que Dominique Nédellec n'ait même commencé à traduire. Manifestement, il y a quelques lusophones... A propos d'un court texte qui parle de la peine de mort ("En raison d'un inexplicable court-circuit, c'est le fonctionnaire qui abaissa le levier qui fut électrocuté, et non le criminel qui se trouvait assis sur la chaise. Comme l'on n'était pas parvenu à réparer la panne, c'était désormais le fonctionnaire du gouvernement qui prenait place sur la chaise électrique, tandis que le criminel était chargé d'abaisser le levier mortel" - extrait de Monsieur Brecht et le Succès), Tavares dit que l'intérêt de son texte n'est pas de dire qu'il est contre la peine de mort, mais qu'il réside dans la caricature : pour lutter contre un adversaire plus fort que soi, il ne faut pas faire de la boxe, mais du judo. Avec le judo, on utilise la force de l'adversaire pour le mettre à terre. Et plus l'adversaire est fort, plus il tombera avec violence. En réponse à une question, il dit que le lieu et l'époque ne sont jamais précisés dans ses livres. S'il situait l'un de ses livres en Argentine au XIX° siècle, le lecteur se mettrait dans ce cadre, alors que la violence n'est caractéristique d'aucune époque, d'aucun siècle.
Le Bairro, c'est comme un univers parallèle : on part fuir le monde réel pendant vingt minutes, et on y revient. Tavares fait beaucoup de mouvements de balancier enchantement/désenchantement. Il ajoute que "Une des choses les plus dangereuses qu'on a autour de soi, c'est la joie". La littérature doit poursuivre les gens, être une sorte de gêne, qui les perturbe. Tavares déteste l'expression "ça se lit comme un roman", qui dit que c'est facile à lire. Or, on doit s'arrêter. Dans la vie, les gens vont à 100 km/heure. Lorsque l'on lit un livre, on doit ralentir : 10 km/heure. Tavares aime la lenteur. C'est une qualité, la lenteur, prendre son temps, regarder. Il y a des dieux grecs pour toutes les qualités, mais pas pour la lenteur ! La lenteur, c'est considéré comme quelque chose de pas positif, de peu intéressant. Alors que, en fait, la lenteur oblige les gens à s'arrêter, à prêter attention aux objets. Dans le cycle O Bairro, chaque "Monsieur" mène une vie autonome dans sa tête, ils vivent tous côte à côte, mais font attention à des choses très différentes. Par exemple, Monsieur Valéry est obsédé par la logique... Il parle de Monsieur Walser, qui s'est établi dans la forêt - on le voit effectivement excentré sur la carte du Bairro : Il y a un conflit très ancien entre la ville et la forêt, la ville ayant pris sa place, l'espace des loups. On croit les loups disparus. Mais la nature a les griffes acérées, et elle attend (on retrouve cette idée dans Apprendre à Prier...). Il suffit de laisser une maison abandonnée pendant trois ans à peine, et la mousse revient, la végétation s'apprête à faire disparaître la maison. Actuellement, on a tendance à assimiler la culture technique avec la culture morale, les deux se confondent. Par exemple, pour le chirurgien (toujours le roman Apprendre à Prier), sa main ne tremble pas, tout le monde loue sa compétence, on va jusqu'à le remercier pour sa bonté (il a sauvé des gens). Ne pas dominer la technique, dire qu'on ne maîtrise pas Windows 2010 (exemple choisi par Tavares) c'est considéré comme une faute morale plus grave que d'avouer qu'on a menti. La référence morale, c'est la machine. On montre aux ouvriers comme la machine est bien, comme elle travaille bien, sans rechigner, qu'il faut prendre modèle sur elle. Il n'y avait pas d'exemplaires de ses ouvrages en portugais à faire dédicacer (une personne prévoyante était arrivée avec des livres à elle), tout était en français. Et je m'en vais.
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