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retour Japon <- retour page d'accueil | Recueils de nouvelles - L'Iris fou ("nouvelles traduites du japonais par I.I. Morris en collaboration avec M Rosenblum et M Beerblock", 1957, 1997). Stock. Bibliothèque cosmopolite. 151 pages. L'histoire de "collaboration", cela veut apparement dire que la traduction française a transité par l'anglais. 1/ Ibuse Masuji (1898-1993) : L'Iris fou. 28 pages. "L'iris fou est la première esquisse de Pluie noire. [...] Tout au long du récit, Ibusé évoque le contraste entre la grande tragédie de la guerre et les détails terre à terre [sic] de la vie courante." (page 7). Pluie Noire est le roman de Ibuse Masuji qui parle des conséquences de la Bombe. L'iris fou commence ainsi : "" (page 9). On n'assiste donc pas directement au bombardement. On peut toutefois lire quelques récits indirects : "" (page 17) Et puis les rescapés sont atteints d'une étrange maladie : "" (page 21). Après Hiroshima, les bombardements, classiques ceux-là, continuaient. "" (page 20). Très bonne nouvelle. 2/ Nakajima Atsushi (1909-1942) : Le
Maître. 15 pages. "" (page 39). Excellente nouvelle, ici dans la traduction disponible en ligne sur http://happy.joueb.com/news/99-nakajima-atsushi-le-maitre . On pourra en lire la critique sur la page consacrée à Nakajima Atsushi. 3/ Akutagawa Ryunosuke (1892-1927) : Le Tableau d'une Montagne à la saison d'automne. 15 pages " " (page 57). Et Wang Shih-Kou raconte l'histoire étrange de ce tableau, chef-d'oeuvre parmi les chefs-d'oeuvre. Très bonne nouvelle, qui traite en fait un peu du témoignage, de l'impression que peut produire une oeuvre, et de la mémoire (thème Akutagawaien, si l'on repense à sa nouvelle Dans le Fourré).
4/ Niwa Fumio (1904-2005) : Odieuse veillesse. 48 pages (c'est de loin la plus longue nouvelle du recueil). "" (page 73). "Très malade, victime lui-même de « cette odieuse vieillesse », il a cessé d'écrire depuis de nombreuses années." (page 73) Très malade, peut-être, n'empêche qu'il a vécu 101 ans ! Odieuse vieillesse, c'est l'histoire de la vieille Umé. Elle a quatre-vingt-six ans, perd la tête, elle devient méchante, elle chaparde, dit du mal des gens, a toujours faim, dit qu'on l'affame, ne se souvient plus qu'elle vient de manger... alzheimer, peut-être bien. "" (page 80). Hop, y'en a marre, on la refile à la famille de la soeur cadette, qui habite à la campagne. "" (pages 110-111) Une excellente nouvelle, très sombre. 5/ Shiga Naoya (1883-1971) : L'artiste. 9 pages. "" (page 123). Bonne petite nouvelle sur un jeune garçon qui collectionne les coloquintes. "" (page 126). 6/ Shiga Naoya (1883-1971) : Le crime de Han. 17 pages. Cette nouvelle commence ainsi : "" (page 135). Le juge d'instruction enquête, on lira l'interrogatoire du directeur du théâtre et de Han. Très bien. Même si la traduction fait quand même parfois un peu vieillot, il s'agit d'un recueil de nouvelles vraiment excellent. Malheureusement, ce recueil était "offert gracieusement" pour le Salon du Livre 1997 (consacré au Japon), et il n'est plus disponible, à part dans les bibliothèques... - Neuf nouvelles japonaises (traduites par Serge Elisséev et "édité pour la première fois en 1924 par G. Van OEst, Editeur"). Réédité en 1984 par Le Calligraphe. 256 pages. Ce qui est très sympathique, et assez émouvant, c'est que Serge Elisséev parle au présent des grands auteurs présentés, car ils étaient vivants lors de l'élaboration de ce recueil, certains même n'avaient pas encore donné la pleine mesure de leur talent, d'autres n'avaient plus longtemps à vivre (Akutagawa). 1/ Shiga Naoya (1883-1971) : Le Crime du jongleur (septembre 1913). 19 pages. Il s'agit d'une nouvelle également connue sous le nom Le crime de Han (voir la 5ème
nouvelle du recueil L'Iris Fou, on pourra d'ailleurs comparer la traduction du petit extrait). "" (page 7). Le juge d'instruction enquête, on lira l'interrogatoire du directeur du théâtre et de Han. Très bien. 2/ Tanizaki Junichirô (1886-1965) : Le Tatouage (1910). 15 pages. "" (Jean-Jacques Tschudin, La Pléiade, page 1595). Tanizaki s'oppose au naturalisme, "" (page 1597). Traduction de Serge Elisséev, 1924 | Traduction de Marc Mécréant, 1966. Lé Pléiade, 1997. | "" (pages 32-33). "" (page 34). | "" (page 4) "" (page 5). | Bien sûr, il va finir par trouver la jeune fille qui convient... Excellente nouvelle, un classique. 3/ Nagai Kafû (1879-1959) : Le Renard. 26 pages. Le narrateur se souvient du "vieux, très vieux jardin de la maison paternelle où je suis né, dans la rue Kanatomi du quartier Koishikawa. C'était il y a déjà trente ans." (page 52). Il y a un vaste jardin, et un jardinier, Yasukichi, qui s'en occupe. "" (page 53). Il se passe des événements dans le vaste monde japonais. "" (page 56). Et un renard est aperçu dans le jardin... Pourquoi les hommes en veulent-ils au renard ? C'est une assez jolie nouvelle sur l'enfance, ses peurs, et l'évaluation des notions du bien et du mal. 4/ Akutagawa Ryûnosuke (1892-1927) : Les Poupées. 23 pages. On trouve également cette nouvelle dans le recueil La
Magicienne. En préambule, nous pouvons lire un poème de Buson : "" " " (page 78) (Texte d'Elisabeth Suetsugu : "Boîte entrouverte / Deux visages délicats / Inoubliable apparition"). Puis la nouvelle débute par "". (page 79 ; à comparer avec la traduction du recueil La Magicienne, le texte établi par Elisabeth Suetsugu disant : "Voici l'histoire qu'une vieille femme m'a contée"... ce qui introduit tout de suite un personnage qui rapporte l'histoire). La nouvelle est assez classique : "." (page 79). Une famille doit se séparer de ses très belles poupées ("En japonais hina désign les poupées qu'on met sur des étagères le jour de la fête des poupées, le 3 mars. Les poupées avec lesquelles jouent les fillettes s'apppellent ningyô)", nous explique une note) : Impératrice, Empereur, dames de palais, musiciens... La différence de comportement des membres de la famille : attachement aux valeurs ancestrales, ou au contraire adoption immédiate des nouveautés (éclairage) est très évident. Pas mal. 5/ Okada Yachio : Les Trois jours. 18 pages. " [...] »" (page 105). (eh oui, Mme Kanako pense en usant de l'imparfait du subjonctif, la vraie classe). "" (page 106). Mme Kanako n'ose pas demander à son mari ce qui se passe. Yumiko, sa soeur, qui n'est pas mariée, ne comprend pas. "- [...] ." (page 115). Bonne nouvelle, notamment la fin. 6/ Kubota Mantarô (1889-1963) : L'Eté qui commence. 15 pages. Une femme, Mlle Osaki, va se marier. Le mari sait-elle qu'elle avait entretenu une liaison avec un acteur ? Ils se marient, mais le passé de chacun d'eux va resurgir. Petite nouvelle pas désagréable. 7/ Hasegawa Nyozekan (1875-1969) : Le Cornac. 49 pages. "." (page 145). " " (page 147). Ces éléphants, ce sont bien sûr des jouets. Le marchand est un veuf qui a une fille de dix-sept, dix-huit ans, qui travaille à l'usine. Il aime boire du saké, ressasser de vieilles histoires... De nombreuses années auparavant, il a été le cornac d'un éléphant. Et il va recevoir une nouvelle proposition... Bonne nouvelle, avec un "héros" pas très sympathique. 8/ Kukichi Kan (1888-1948) : Le double suicide de Shimabara. 30 pages. Un écrivain veut écrire un roman feuilleton sur les double-suicides. Il se rend chez un ami à lui, qui lui raconte une affaire sur laquelle il avait travaillé du temps où il était procureur. Bonne nouvelle, dans laquelle on voit l'humanité et la compassion finir par transparaître dans l'application froide de la justice. 9/ Satomi Ton (1888-1983) : Le bruit des vagues de la rivière. 26 pages. "." (page 231). Lui, c'est M.Seta. Il se réveille dans un hôtel. A côté de lui, une Mlle Katsuyo dort toujours. "" (page 233). Il repense à sa femme. "" (pages 233-234). Seta est un type pas bien gai, sans illusions, qui préfère faire boire les autres plutôt que de boire lui-même, et la nouvelle conte son histoire, pas bien gaie et sans illusions. Pas mal du tout. Globalement, un très bon recueil de nouvelles, qui illustrent la diversité de la littérature des années 20, contemporaine du traducteur-présentateur, Serge Elisséev. - Anthologie de nouvelles japonaises contemporaines, Tome 1 - Jeunesse (Sengo tanpen shôsetsu saihakken 1 : Seishun no hikari to kage. 2001). Editions du Rocher. 281 pages. Nouvelles traduites du japonais en 2007 par Jean-Jacques Tschudin et Pascale Simon. Avant-propos : "" (page 8). 1/ On commence par Dazai
Osamu (19/06/1909-13/06/1948) : Bizan (Bizan, mars 1948 ; traduit par Pascale Simon ; 15 pages). Bizan, c'est le nom de la serveuse d'un bar-restaurant. Elle est très naïve, à la limite de la bêtise, mais aussi très dévouée, limite collante. Le narrateur et ses amis, habitués de cet établissement, ne se privent pas de la charrier. Méchante et cruelle jeunesse ! Elle leur tape vraiment sur le système. Elle, de son côté, éprouve de l'admiration pour le narrateur (un écrivain, bien sûr) et ses amis. "[...] " (page 22). En plus d'avoir du mal à comprendre, Bizan a un comportement étrange, fait des étourderies, elle dévale les escaliers lourdement, en faisant beaucoup de bruit, dérange les gens... Très bonne nouvelle. 2/ Ishihara
Shintarô (né le 30/09/1932) : Une parfaite partie de plaisir (Kanzenna yûgi, octobre 1957 ; traduit par Pascale Simon ; 34 pages). "" (page 27) Deux hommes sont dans une voiture. On est dans un coin de campagne, il se fait tard. "[...] " (page 28). La femme attend le bus. "" (page 30). Les deux jeunes hommes sont totalement dénués de moralité. Ils sont du genre à prendre leur plaisir en se fichant complètement des autres. Et la femme de l'histoire est faible, psychologiquement parlant. Le texte est un peu comme le Funny Games de Michael Haneke : froid et glauque à la fois, avec un style clinique. Une très bonne nouvelle, mais horrible en même temps. La jeunesse dans ce qu'elle a de pire. 3/ Ôé
Kenzaburô (né le 31/01/1935) : Le Centre de recherche sur la jeunesse en déroute (Kôtai seinen kenkyûjo, mars 1960 ; traduit par Jean-Jacques Tschudin ; 23 pages). Cette nouvelle se "déroule dans le contexte de l'échec politique des luttes menées après-guerre contre le renouvellement du Traité de sécurité nippo-américain en 1960" (postface, page 268). "" (page 61). Le narrateur, vingt ans, a un petit boulot d'étudiant dans un minuscule centre de recherches, le Gorson Interview Office, dirigé par Mister Gorson, un jeune Américain, chercheur socio-psychologue de trente ans. Tous les mois, Mister Gorson envoie à un centre de recherches, aux Etats-Unis celui-ci, les données recueillies au Japon : il s'agit des interviews d'étudiants déprimés, d'anciens activistes ayant perdu leurs illusions. "" (page 65). Bien sûr, il ne peut pas y avoir indéfiniment des jeunes en déroute venant, contre rémunération, raconter leurs vies. Pour ne pas perdre son emploi, il faut parfois être... - comment dire ? - pro-actif... On est chez Ôé : le jeunesse, les mouvements politiques, les idéologies (ou ce qu'il en reste)... C'est une bonne nouvelle. 4/ Ogawa
Kunio (né le 21/12/1927) : Les Champs pétrolifères de Sagara (Sagara yuden, juillet 1965 ; traduit par Jean-Jacques Tschudin ; 20 pages). Une jeune institutrice, Kanbayashi Yumiko, fait classe à des sixième. Le cours est consacré au pétrole. "." (page 88). "La question de savoir s'il y avait réellement des champs pétrolifères à Omaezaki en venait à le préoccuper. Qu'il y en eût, il était certain de l'avoir entendu dire quelque part. Mais il ne se rappelait plus qui avait raconté cela, ni quand ni où ça s'était passé." (page 89). Cela va vraiment le perturber, il va en rêver... La suite baigne dans un onirisme symboliquo-étrange que l'auteur semble apprécier. Un texte très lisible. 5/ Maruyama Kenji (né le 23/12/1943) : L'arrêt de bus (Basu-tei, mars 1977 ; traduit par Jean-Jacques Tschudin ; 23 pages). Une fille issue de la campagne est allée en ville gagner sa vie. Elle est visiblement devenue entraîneuse, ou quelque métier équivalent. Elle revient pour quelques jours dans sa campagne natale. Elle se sent en décalage total : elle peut raconter n'importe quoi, semble-t-il, on la croira. La nouvelle se passe quasiment entièrement à l'arrêt de bus où la fille se trouve, en compagnie de sa mère, et où elle attend le bus qui la mènera à la gare où, enfin, elle pourra revenir à la Grande Ville. Enfin, elle pourra boire la bonne bière fraîche dont elle rêve... Est-ce que ses parents se demandent d'où elle sort son argent ? La communication qui n'est finalement plus possible entre la fille et ses parents - et la petite bourgade en général - car ils sont restés ce qu'ils sont, tandis que la fille a changé au contact de la ville, et n'ont maintenant plus rien en commun, est très bien rendue : la mère paraît un peu intimidée, et en même temps, elle a les mêmes gestes qu'autrefois (elle sort une serviette de toilette pour essuyer la sueur de sa fille). Elle fait un peu honte à sa fille, qui en même temps ne peut pas la rejeter complètement. Pas mauvais texte. 6/ Nakazawa
Kei (née le 06/10/1959): Franchissant le bras de mer (irie e koete, avril 1983 ; traduit
par Jean-Jacques Tschudin ; 39 pages). Sonoé est une jeune fille en lycée. " [...]". (pages 129-130). Elle y va en avance. Ainsi, elle pourra passer une journée avec Nirono Minoru, un charmant jeune homme. Mais va-t-il vraiment venir ? Aurait-elle mal compris ? Ou pas ? Ou si ? Ou bien non ? Ou bien peut-être que... va-t-il rompre sa promesse ? Ou pas ? Ou peut-être ? Pourra-t-elle faire cette chose-là ? "" (page 138). C'est vraiment très long - la plus longue nouvelle du recueil). Il décrit peut-être en profondeur la psychologie adolescente, mais ce que cela peut être ennuyeux ! 7/ Tanaka Yasuo (né le 12/04/01/956) : Comme avant (Mukashi mitai, février 1987 ; traduit par Jean-Jacques Tschudin ; 20 pages). "" (page 169). La narratrice est une jeune femme, "" (page 170). Son fiancé, Yûichirô, est un journaliste actuellement en déplacement à Manille pour couvrir la situation politique tendue. C'est le portrait d'une jeune fille assez d'une famille assez aisée, bourgeoise, un peu occupée d'elle-même. Elle aime son fiancé, c'est du moins ce qu'elle pense (ou croit, ou voudrait penser : "", page 185), mais va manger avec son ancien amant, homme à femmes, avec qui, finalement, elle a vécu des moments plus intéressants ("", page 184). Elle va se ranger et, pour cela, semble se persuader qu'elle aime son Yûchirô. Une nouvelle un peu triste, pas complètement marquante, mais pas mauvaise non plus. 8/ Miyamoto Teru (né le 06/03/1947 -) : Un chemin écrasé de chaleur (astui michi, été 1987 ; traduit par Jean-Jacques Tschudin ; 23 pages). Deux amis, le narrateur et Ôsugi, vont manger. Ils discutent du passé. "" (page 191). Ah, comment ne s'en souviendrait-il pas de cette fille, une "" ! Malgré un petit côté artificiel (pourquoi Ôsugi ne lui a-t-il jamais parlé de tout ce qu'il va lui apprendre ? "",
page 191, ce qui veut dire qu'il se sont vus ou parlé à de nombreuses reprises) qui permet au lecteur de découvrir tout ensemble le passé lointain et le passé très proche, l'un dans l'autre, c'est quand même une bonne nouvelle qui "" (postface, page 270). 9/ Kita Morio (né le 01/05/1927) : Kamikôchi (Kamikôchi, mai 1988 ; traduit
par Jean-Jacques Tschudin ; 30 pages). C'est visiblement un texte autobiographique. Le père du narrateur est un écrivain connu de tanka. Dans la vie quotidienne, il est désagréable, colérique. Son fils n'a jamais rien lu de lui. Son père a quitté sa mère, sans qu'il sache pourquoi. "" (page 219). Il se met à écrire lui-même des petits poèmes. On est pendant la guerre. Le narrateur est étudiant, il va assister à la cérémonie d'entrée à l'"Ecole supérieure", puis se présenter à Tôkyô, convoqué par l'armée. Auparavant, il se rend à Kamikôchi, vallée connue pour ses beaux paysages (voir ici). C'est un peu long. Il marche, collectionne les insectes, et en oublie sa volonté enfantine de se sacrifier héroïquement pour le peuple japonais. C'est un texte qui brasse de nombreux thèmes de thèmes qui ont du potentiel (la guerre lointaine avec ses bombardements / la nature présente, les sentiments enfantins vus à distance par le narrateur adulte, la dualité d'un père écrivain colérique mais auteur de très beaux tanka...), mais finalement se focalise trop sur tout ce que le narrateur fait, où il va, s'il a mal aux pieds, quel sentier il suit, où il arrive, ah, le pont a été emporté paraît-il, il faut suivre la rive gauche de la rivière (pas la droite, hein, la gauche). 10/ Kanai Mieko (née le 03/11/1947) : Couleurs d'eau (Mizu no iro, automne 1992 ; traduit par Jean-Jacques Tschudin ; 20 pages). Voilà une nouvelle dont il est difficile de parler. Le style est extrêmement prépondérant, les phrases très longues (presque deux pages pour la première), très travaillées. Une femme s'est suicidée, elle s'est noyée. "[...] " (page 255). C'est indéniablement bien écrit. On aimerait lire d'autres textes de cet auteur. Les textes volontairement - et ostensiblement - très travaillés ne sont finalement pas très courants dans ce qui est traduit chez nous En conclusion, un recueil globalement pas inintéressant, mais vraiment inégal. On constate que les textes les plus réussis sont généralement ceux écrits par des auteurs déjà bien connus chez nous (Dazai, Ôé, Miyamoto Teru) ou réputés (Ishihara Shinrarô). Et que Kanai Mieko semble être une auteure intéressante (d'ailleurs, il paraîtrait qu'un livre de Kanai Mieko, Le livre de mots, sortirait en français...) En couverture : estampe d'Utamaro, détail. - Le Secret de la petite chambre. Deux récits érotiques traduits du japonais en 1994 par Elisabeth Suetsugu et Jacques Lalloz. Picquier Poche. 134 pages. Introduction de Hiroshi Suetsugu. Ce livre contient deux nouvelles érotiques : Le Secret de la petite chambre (attribuée à Nagai Kafu) et La Fille au Chapeau rouge (Akutagawa ?). "" (introduction, page 7). Le lieu, mais aussi notamment le style. Là, en français, ça n'est pas évident. "[...] " (page 7). 1/ Le Secret de la petite chambre (de la plume fantaisie de Kinpu Sanjin) (Yojôhan fusuma no shitabari) a été publié pour la première fois en 1940. Il est attribué à Nagai
Kafû. 23 pages. Le narrateur, Kinpu Sanjin, trouve par hasard un texte écrit par un "audacieux pinceau" et qui commence par : "« ... " (page 21). A vingt ans, lorsqu'il voyait "" (page 22). "" (page 25). Suivent douze pages très explicites. Ce récit est le portrait, ou plutôt la confession, d'un homme qui ne peut se contenter, comme il le dit, des trois repas assurés chez lui, et qui se paye le luxe de consommer ailleurs. "[sa femme]" (page 38). C'est un petit texte pas inintéressant, mais la scène de coucherie - malgré la sorte de combat tactico-psychologique entre le narrateur aguerri et Sodeko - est quand même un peu longue... 2/ La Fille au Chapeau rouge (Akaï bôshi no onna). Ce texte est traditionnellement attribué à Akutagawa. 90 pages. L'histoire commence "". "" (page 45). Un jour, quittant ses amis, il va se promener tout seul. "" (page 45). Il regarde les femmes, et certaines lui rendent bien son regard... Mais comment communiquer avec elles ? En effet, il ne connaît pas un traître mot d'allemand (page 48, ce qui est démenti à la page 53, lorsqu'il dit avoir pris la précaution d'acquérir les rudiments de cette langue... curieuse contradiction). Il tente de parler français, mais il sent que cela peut être mal perçu... d'ailleurs, à un moment, dans un hôtel, il voit une affiche rédigée en français "" (page 110) "." (page 49). On apprend que, dans l'Allemagne en crise de l'époque, les Japonais (notamment) avec leurs yens sont les rois du monde : le jour du début de la nouvelle, un petit yen équivalait à quelque chose comme 15 millions de marks... reste bien sûr à savoir ce qu'on peut acheter avec. "[...]Comme le dit un de ses amis, un peu ivre à ce moment-là : " (page 80). Bien sûr, il y a les inévitables et très descriptives scènes de coucherie (pas toujours couché, d'ailleurs), mais cette nouvelle a un vrai intérêt, et est finalement marquante, grâce aux problèmes qui se posent au narrateur non germanophone (comment sauver les apparences au restaurant lorsqu'il y invite sa conquête, avec qui il ne se comprend pas ?), au fait que le narrateur veut respecter les convenances vis-à-vis de ses compatriotes Japonais qui vivent à Berlin (et ils sont nombreux !), et donc de manière générale grâce au contexte, à tout ce que l'on voit de sordide dans le Berlin de ces années d'après première-guerre, avec toutes ces jeunes filles qui cherchent à lier connaissance avec des Japonais forcément riches... Dure et triste époque. Le recueil aurait mérité de s'appeler La Fille au Chapeau rouge, mais c'est sûr que Le Secret de la petite chambre laisse moins de doute quant au contenu. Couverture : Lorenzo Mattotti - Anthologie de nouvelles japonaises contemporaines, tome 3 - Amours (Sengo tanpen shôsetsu saihakken 3 : Samazama naren.ai. 2001). Editions du Rocher. 308 pages. Nouvelles traduites du japonais en 2008 par Jean-Jacques Tschudin. "" (Shimizu Yoshinori, postface, page 288). Les douze nouvelles, présentées chronologiquement (comme dans les trois autres volumes thématiques), permettent de percevoir en partie l'évolution des moeurs après la Seconde Guerre Mondiale. On peut quand même se demander si une nouvelle de 1953 devraient faire partie d'une anthologie de nouvelles contemporaines. 1/ Yamakawa Masao (25/02/1930-20/02/1965)
: Feux d'artifice de midi (Hiru no hanabi, mars 1953; 17 pages). Un jeune homme et une jeune fille vont assister à un match de base-ball. "(page 13). Elle lui annonce qu'elle va se marier." (page 19). Que restera-t-il de leur histoire ? Le jeune homme se remémore un feu d'artifice qu'ils avaient vu ensemble des mois auparavant : "" (page 23). Bonne nouvelle mélancolique et délicate. 2/ Dan Kazuo (03/02/1912-02/01/1976) : Un chemin de lumière (Hikaru michi, mai 1956 ; 27 pages). Une note précise que l'histoire s'inspire d'un épisode du Journal
de Sarashina, un texte du XI° siècle (la même note donne une indication sur la fin de la nouvelle, ainsi que sur celle du texte du XI° siècle, ce qui est dommage). Un homme de vingt-trois ans travaille comme garde du Palais. "" (page 30). Une matinée de fin d'été, la troisième fille de l'empereur, qui venait de fêter ses seize ans, le remarque. "." (page 32). Elle ne connaît rien à la vie. Elle lui demande de l'enlever... Très bonne nouvelle, qui combine beauté et violence, très bien écrite. 3/ Iwahashi Kunie (10/10/1934-11/06/2014) : Contre-jour (Gyaku-kôsen, juin 1956 ; 33 pages). "" (Shimizu Yoshinori, postface, page 291). Globalement pas mauvaise mais trop longue, cette nouvelle présente l'intérêt de plonger le lecteur dans un milieu dans lequel les moeurs ont évolué rapidement. Les étudiants de l'époque truffaient leurs phrases de mots occidentaux : "" (page 64). Le lecteur lit aussi, un peu stupéfait : " [...]" (page 65). Quelle est cette étrange réalité alternative dans laquelle Debussy a écrit un, voire plusieurs concertos ? Est-ce un problème dans le texte japonais, ou bien un accident de traduction ? 4/ Maruya Sai.ichi (27/08/1925-13/10/2012) : Le Cadeau (Okurimono, octobre 1967 ; 21 pages ). La nouvelle met en scène des soldats japonais qui viennent d'être démobilisés après la défaite. Dans quelques jours, ils devront remettre leur matériel aux Américains. "" (page 92). Dans ce contexte d'incertitude et de flou quant à l'avenir et aux relations hiérarchiques, les hommes regardent particulièrement une femme du village... Bonne nouvelle. 5/ Oba Minako (11/11/1930-24/05/2007) : le Daim décapité ( Kubi no naai shika, printemps 1969 ; 20 pages). La nouvelle commence ainsi : "" (page 113). C'est violent, ça commence de façon frappante. Ensuite, on a plein de symboles, un artiste raté mais homme dominateur, une femme qui "" (postface, page 293). On peut aimer, ou pas. 6/ Seto.uchi Harumi (15/05/1922) : Deux plus un (Futari to hitori, février 1972 ; 132 pages) "" (page 153). Cette nouvelle "" (postface, page 293). De Seto.uchi Harumi, je n'avais déjà pas aimé son roman La Fin de l'Eté ; j'ai trouvé cette nouvelle très ennuyeuse. 7/ Noro Kuninobu (20/09/1937-07/05/1980) : L'Amant (Koikito, mars 1974 ; 18 pages). Un homme et une femme prennent ensemble un bateau-promenade. "" (page 165). Qu'est-ce que la femme veut annoncer à l'homme qui l'aime, sachant qu'elle-même est amoureuse depuis des années d'un autre homme, marié ? Une nouvelle très lisible. 8/ Takahashi Takako (02/03/1932-) : Une constitution maladive (Byôshin, juin 1978 ; 20 pages). Au début, une femme et un homme se parlent au téléphone. L'homme annonce qu'il est malade. C'est un habitué des maladies. La femme veut en savoir plus, apprendre tous les détails pour tenter de connaître l'homme de l'intérieur : en effet, la maladie peut être une sorte de révélateur. "" (page 193). Il y a une certaine originalité dans cette nouvelle pas mauvaise du tout. 9/ Ôoka Shôhei (06/03/1909-25/12/1988) : L'Enterrement
d'Ophélie (Ofelia no maisô, février 1980 ; 21 pages) "[...]" (postface, page 295). "" (page 207). " [...] " (postface, page 296). Ce n'est pas mauvais, mais quand même : de Ôoka Shohei, l'auteur des Feux, dont l'un des grands thèmes est la Seconde Guerre Mondiale, n'était-il pas possible de trouver une nouvelle plus personnelle ? 10/ Yamada Eimi (08/02/1959-) : Feux d'artifice (Hanabi, août 1989 ; 21 pages) "" (page 225). La narratrice est une fille de dix-neuf ans, pétrie de rêves romantiques, mais qui n'a pas vécu grand-chose. Elle va être envoyée par ses parents pour se rendre compte de la situation de sa soeur... Tout en réprouvant la vie que mène sa soeur, la narratrice va voir ses certitudes quelque peu ébranlées... Bonne nouvelle, avec un fond de pessimisme. 11/ Uno Chiyo (28/11/1987-10/06/1996) : Une histoire de galets (Aru koishi no hanashi, août 1992 ; 9 pages). Un homme et une femme se connaissent depuis longtemps. Ils s'apprécient mais ne sont jamais allés plus loin. Un événement va peut-être changer cette situation... Une jolie nouvelle. 12/ Takagi Nobuko (09/04/1946-) : Lévitation (Fuyô, mars 1993 ; 27 pages). Un homme, professeur d'université marié, et une femme, mariée elle aussi, ont une attirance réciproque. Mais ils hésitent, semblant apprécier de se rencontrer sans qu'il se passe rien d'autre. Un jour, l'homme a fait le dessin d'"" (page 274). Il va expliquer les particularités de cette plante, particularités en résonance avec la situation qu'ils vivent... Original, pas mauvaise du tout. "" (Shimizu Yoshiniori, postface, page 298) Un recueil inégal, mais intéressant. - Je mange bien, ne t'en fais pas - quatre récits de coeur et de cuisine (Cheese to shio to mame to. 2013). Philippe Picquier. 177 pages. Récits traduits du japonais en 2021 par Déborah Pierret-Watanabe. " (Ryôko Sekiguchi page 5). Tout d'abord quelques pages sont consacrées au "Fenouil, parfum du terroir", par Armand Arnal, chef du restaurant La Chassagnette à Arles. Ce texte finit par : "" (page 9) Puis viennent quatre récits, écrits par quatre auteures différentes. Pourquoi n'y a-t-il que des photos d'elles, photos jugées apparemment plus importantes qu'une présentation ne serait-ce que de quelques lignes, une petite biographie et/ou bibliographie ? Par exemple, concernant Mori Eto, elle est (merci Wikipedia) notamment l'auteure du roman Colorful, dont l'adaptation en animé a eu du succès (prix à Annecy...), alors pourquoi ne pas l'écrire ?... De plus, c'est me semble-t-il son premier texte traduit en français. Pourquoi ne rien en dire et obliger le lecteur à aller voir sur le Net ? Mais, surtout, pourquoi quatre auteures japonaises ont-elles décidé d'écrire des textes situés en Europe dans lesquels la gastronomie locale joue un grand rôle ? Ces textes ont-ils été écrits pour ce recueil ou bien rassemblés après coup ? Pourquoi le choix de ces pays, de ces régions ? Des affinités ? Un tirage au sort ? Eh bien, on ne le saura pas. Il était apparemment plus important de consacrer plusieurs pages au "Fenouil, parfum du terroir". Il y a vraiment des choses qui m'échappent. Mais arrêtons de râler et lisons les quatre récits du recueil. 1/ Kakuta Mitsuyo (1967-)
: Le Jardin de Dieu (43 pages). Nous sommes dans une petite ville du Pays Basque. Le père de la narratrice est restaurateur. Il va annoncer à toute la famille que sa femme, hospitalisée, n'en a plus pour longtemps. Cependant, il le fait en proposant de bons petits plats, ceux justement que sa femme aime, même si elle ne peut pas être présente. Cette façon de faire révolte la narratrice : ce type d'annonce, ça ne doit pas être une fête où l'on mange et où l'on boit ! Le lecteur comprend facilement la raison de ce choix, mais la Jeunesse, elle, se braque sans chercher à comprendre, c'est bien connu. Dès lors, la narratrice va tout faire pour quitter cette petite ville arriérée et découvrir enfin d'autres horizons, la grande ville, tout ça. La façon dont elle finira par comprendre le choix de son père n'est pas mal amenée. Mais on se dit que, quand même, elle aurait pu comprendre plus tôt (ce qui est certes plus facile quand on n'est pas émotionnellement impliqué). Le texte est un peu long, mais cette longueur permet sans doute de mieux ressentir les tournants que peut prendre une vie non planifiée dès le début, quelqu'un qui se cherche. Plus anecdotiquement (et pour le plaisir de râler), l'héroïne a beau avoir fait des études, elle a des problèmes avec les maths : "(page 43). Ma calculatrice me dit qu'elle est donc absente entre 6 et 12 mois par an. Quand elle dit qu'elle est à Barcelone la plupart du temps, j'ai comme un doute sur ce que je lis. 2/ Inoue Areno (04/02/1961-)
: Les Raisons (33 pages). Inoue Areno est l'auteure d'un grand nombre de romans, nouvelles, essais. En français, on ne trouve que L'Ode au chou sauté (j'ai craqué à la moitié, je ne parlerai donc pas de ce roman), qui a inauguré chez Picquier la collection Le Banquet. Cette fois, nous sommes dans une petite maison isolée du Piémont. Le récit commence ainsi : "(page
59). Carlo n'est pas en bonne santé, pour dire le moins... Par flashbacks, on va savoir comment est née la relation de la narratrice avec son professeur d'anglais. On est plus dans le passé que dans le présent, mais on sent que la narratrice va devoir laisser ce passé et aller de l'avant. Un petit récit pas très marquant, mais pas mauvais non plus, qui tient souvent de la vignette. 3/ Mori Eto (02/04/1968-)
: Blé noir (41 pages). Mori Eto a reçu pas mal de prix importants (Noma, Naoki...) et est notamment l'auteure du roman Colorful (1998 ; porté à l'écran avec succès en 2010, comme écrit plus haut, par Hara Keiichi, le réalisateur de Miss Hokusai), dont plus d'un million d'exemplaires ont été vendus, ce que proclame la couverture de la version anglo-saxonne - car le livre a été traduit en anglais. Cette fois, nous sommes en Bretagne. Voici le début du texte : " (page 95). Notre héros part immédiatement pour le Finistère. Les habitants de sa petite ville natale sont pleins de superstitions et très à cheval sur ce qui se fait ou non. Par exemple, les galettes, c'est très bien, alors que... "" (page 98). On comprend que notre héros ait voulu partir. Finalement, c'est un peu comme dans la première nouvelle : naissance dans un coin isolé, volonté de quitter ces esprits étroits, ces traditions dépassées et sclérosantes, de découvrir le monde et la liberté ; puis, le temps passe, et pour une raison ou une autre on est amené à revenir au point de départ ou pas loin, et on se rend compte que tout n'y était pas complètement noir. À un moment, il y a un peu du Festin de Babette dans cette nouvelle (manger, c'est aussi un plaisir, même pour les gens pincés pour qui avaler de la nourriture, c'est juste destiné à vivre), mais évidemment le Festin
de Babette, c'est autre chose, c'est mémorable. Le récit reste très lisible, quand même. Pour la forme, on notera l'emploi pas très heureux d'un "littéralement". Il faudrait obliger à bien réfléchir avant chaque utilisation de ce mot, puisque neuf fois sur dix, ça fait dire des âneries (généralement le contraire de ce qu'on veut dire, quand ce "littéralement" est accolé à une métaphore, du genre littéralement
noyé sous le travail). Ici, c'est (page 100): "... ". Etre épuisé, je sais ce que ça veut dire. Mais être épuisé littéralement... hmmm... je cherche encore... 4/ Ekuni Kaori (21/03/1964-)
: Alentejo (39 pages). Pour cette dernière nouvelle, nous sommes au Portugal. Un couple gay a loué pour quelques jours de vacances un cottage dans un coin perdu, dans le but de faire du tourisme culinaire (dont on ne verra pas grand-chose, la nourriture n'est pas du tout le coeur du récit, qui finalement aurait très bien pu ne pas figurer dans ce livre). Il fait chaud. Il ne se passe pas grand-chose, à part une bizarrerie à un moment ou deux, sans doute super symbolique, et pas limpide (", page 155 ; effectivement), ça rajoute de la profondeur, du mystère (les coins isolés sont forcément mystérieux, les traditions et autres forces primitives sont plus présentes qu'en ville). On croise quelques personnes. Il continue à faire chaud. Et, à un moment, il est temps de partir. Le moins bon récit du recueil, de loin. Ah, pour finir, vous vous demandez qui est l'auteur de la couverture, d'où provient l'oeuvre ? Dommage pour vous, vous ne le saurez pas : "en couverture (c) D.R."
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